QUESTIONS À… Augustin Fragnière*, directeur adjoint du Centre de compétences en durabilité de l’Université de Lausanne
La compensation carbone peut-elle être une solution à la crise climatique ?
Non, car compenser signifie financer des projets de réduction des émissions ou de séquestration ailleurs au lieu de réduire ses propres émissions, or le climat ne fonctionne pas sur le principe des vases communicants. D’ici 2050, nous devons tous cesser complètement d’émettre du CO2, et nous ne pouvons pas payer pour que d’autres le fassent à notre place. La compensation carbone est un moyen de continuer notre mode de vie très émetteur tout en soulageant notre conscience. Elle est parfois comparée au trafic d’indulgences au Moyen Âge, où les riches payaient cher pour racheter leurs péchés.
L’Ademe préconise pourtant de choisir des projets de compensation labellisés.
Si l’on choisit de compenser, il faut le faire bien. Il existe deux marchés de la compensation. L’un est institutionnalisé dans le cadre de l’accord de Paris, il garantit des critères de qualité des crédits carbone mis sur le marché. L’autre est un marché volontaire, qui s’adresse aux entreprises et aux particuliers : il n’est pas du tout régulé, et la qualité des projets soutenus est variable. Des labels comme le Gold Standard ont donc une utilité : ils garantissent l’intégrité environnementale des projets.
Quelles autres pistes sont plus crédibles ?
Il y en a beaucoup. Le cabinet Carbone 4 propose par exemple la Net Zéro Initiative, un référentiel qui contient trois modalités d’action : réduire ses émissions directes et indirectes en rénovant les bâtiments, en sortant des énergies fossiles… ; aider les autres à réduire les leurs notamment par la finance climatique, qui n’est pas de la compensation ; augmenter les puits de carbone en plantant des arbres et en changeant de pratiques agricoles, etc.
* Auteur de La Compensation carbone : illusion ou solution ? (PUF)