Grande-Bretagne • « Green industrial revolution » : les ambitions décarbonées du Royaume-Uni
En novembre 2020, le gouvernement anglais lançait un vaste plan pour décarboner l’économie du pays. Ce plan suffira-t-il pour atteindre les objectifs de neutralité carbone à l’horizon 2050 ?
Ce n’était jamais arrivé depuis 1882. Pendant deux mois de l’été 2020, le Royaume-Uni, berceau de la révolution industrielle, a produit de l’électricité sans brûler de charbon. Les quatre dernières centrales au charbon sont restées à l’arrêt, et seront définitivement fermées dans quelques années. En éliminant progressivement ses centrales, il a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 44 % depuis 1990, la baisse la plus rapide de tous les pays développés. En juin 2021, le gouvernement anglais annonçait la fin de la production d’électricité avec le charbon en 2024.
Les industriels décarbonent
à tout va pour consommer
moins d’énergie.
Six mois plus tôt, il présentait un « Plan pour une révolution industrielle verte » en dix points, doté de 12 milliards de livres sterling (13,4 milliards d’euros). Ce plan prévoyait de réduire les émissions industrielles de 60 % en quinze ans et d’atteindre zéro émission nette en 2050, de porter à 40 % la part des sources d’énergie décarbonée dans le mix énergétique de l’industrie britannique, et de créer 250 000 emplois verts qualifiés d’ici 2030. Le plan soutenait notamment neuf projets d’infrastructure de décarbonation, par capture et stockage de carbone ou production d’hydrogène vert. Parmi ces projets : la décarbonation du pôle industriel de Teesside, dans le nord de l’Angleterre, la construction de l’usine de production d’hydrogène H2H Saltend, et un dispositif de capture du carbone dans le Lincolnshire. Il introduisait aussi de nouvelles règles sur la mesure de la performance énergétique et carbone de bâtiments commerciaux et industriels.
Une révolution qui risque de ne pas tenir ses promesses
Depuis, les industriels décarbonent à tout va leurs activités, pour diminuer leur consommation d’énergie et passer à des sources d’énergie renouvelables, dont le prix ne cesse de baisser. Selon une étude publiée en juillet dernier par Make UK, l’organisation professionnelle de l’industrie manufacturière, la hausse des coûts de l’énergie et des matières premières accélère les efforts de décarbonation des entreprises, malgré la dégradation de l’économie. Les trois quarts des industriels interrogés ont déjà mis en œuvre leur stratégie de décarbonation ou s’apprêtent à le faire au cours des douze prochains mois. La moitié d’entre eux ont ajusté leurs pratiques commerciales pour réduire la consommation d’énergie à cause de la hausse des prix en 2022. Malgré ces succès indéniables, il reste encore beaucoup à faire : remplacer les chaudières à gaz par des pompes à chaleur et les moteurs thermiques par des moteurs électriques, par exemple. Et alors que les émissions liées à la production d’électricité ont chuté de 6 % entre 1990 et 2019, celles des transports n’ont baissé que de 5 %.
Ce « plan en dix points » permettra-t-il d’atteindre les objectifs de neutralité carbone d’ici 2050 ? À sa sortie, il a été salué par les ONG écologistes comme « un premier pas robuste dans la bonne direction ». Mais Sir David King, directeur du Climate Crisis Advisory Group à l’université de Cambridge, le jugeait loin d’être suffisant pour tenir la promesse de la neutralité carbone en 2050 et assurer un avenir sans risque climatique à la population anglaise. Un an plus tard, les ONG dénonçaient le retard pris dans l’application des engagements : « En l’état actuel, un quart seulement des réductions nécessaires pour atteindre l’objectif climatique de 2030 sera réalisé. »