L’ÉDITO DE THOMAS BONNEL
Il y a d’abord un consensus : la lutte contre les émissions de CO2 est une urgence et le développement de transports décarbonés en est l’un des corollaires principaux. Chacun s’accorde sur l’impact des mobilités en termes d’émissions – pas seulement de carbone d’ailleurs, également de particules fines, mais ce pourrait être le thème d’un autre cahier de L’Abécédaire. Autre concordance de points de vue, la « révolution H2 » passera prioritairement par les mobilités lourdes et les usages professionnels. Le parc privé n’a pas encore opéré sa conversion à l’électrique et il faudra du temps avant que l’usage de l’hydrogène s’y généralise – si tant est que cela constitue une perspective en soi.
Il y a d’autre part des constats à dresser. Les initiatives en matière de développement de l’hydrogène sont foisonnantes et largement encouragées. Recherche et développement, investissements dans des unités de production, matériels roulants (trains, taxis, véhicules utilitaires, camions ou bus…), projets pilotes de grande ampleur tels que le partenariat récemment annoncé par le port de Marseille-Fos (voir p. 28-29), sans parler des exemples à l’étranger : la liste relève d’un inventaire à la Prévert. Et les Régions font singulièrement de l’hydrogène un véritable enjeu de communication politique et d’attractivité des territoires.
Il y a enfin le cadre légal. Entre la LOM et la loi Énergie-Climat (2019), la loi Climat et résilience (2021), les textes en négociation au niveau de l’Union européenne quant à la part d’ENR (dont l’hydrogène vert) dans les transports à horizon 2030, l’arsenal juridique et la volonté politique sont au rendez-vous. Ou presque, compte tenu des divergences d’appréciation et d’intérêts, reflet de l’intense compétition entre les acteurs relayée par les États membres.
Maintenant, il faut passer aux actes, et rapidement. Ce qui suppose, concrètement, de simplifier les autorisations, d’assouplir certaines réglementations (ainsi sur l’injection d’hydrogène dans les réseaux), et de libérer du foncier pour développer la production à proximité des usages. En acceptant une phase de transition nécessaire pour accélérer la dynamique et ne pas briser les initiatives d’ores et déjà prises. Avec pragmatisme et surtout sans céder aux querelles de chapelles.