Auxerre, Versailles, Montpellier : trois stratégies différentes
Alors qu’Auxerre mise à plein sur les bus à hydrogène, Versailles reste sur une phase expérimentale, et Montpellier a renoncé. Trois stratégies différentes, mettant en lumière les hésitations qui agitent les élus. Témoignages.
Auxerre : avec AuxHYGen, cinq bus à hydrogène alimentés
Inaugurée en octobre 2021, la station AuxHYGen (Hynamics), d’une capacité d’1 MW (400 kg d’hydrogène vert par jour), alimente cinq bus à hydrogène, circulant sur l’une des lignes les plus fréquentées du réseau de transport urbain de l’Auxerrois. Cinq autres bus sont prévus en 2023. Les conducteurs ont tous reçu une formation sécurité auprès du constructeur Safra. Côté passagers, on apprécie « le silence » et le fait que « ça ne pollue pas » (L’Yonne Républicaine, septembre 2021). « La genèse est règlementaire, avec l’obligation de décarboner les mobilités pour les collectivités. De plus, la Région Bourgogne Franche-Comté soutient la R&D sur l’hydrogène », explique Crescent Marault, maire d’Auxerre. Élu en 2020, il admet « s’être questionné, vu le coût à consentir (750 000 € l’unité), alors que l’on sait que les budgets mobilités sont structurellement déficitaires ». Mais le maire mise sur le stockage de l’électricité sous forme d’hydrogène, « ce qui assurera une autonomie énergétique. Je peux espérer un retour sur investissement. » L’hydrogène est aussi un bon vecteur de communication institutionnelle, pour les administrés (« les gens sont fiers de monter à bord de bus à hydrogène »), et pour attirer des porteurs de projets sur notre territoire. Crescent Marault croit aussi au rétrofitage des parcs de bus et utilitaires diesel. Une solution « moins coûteuse que des acquisitions ».
Versailles privilégie une approche expérimentale
Deux bus à hydrogène Van Hool circulent depuis septembre 2019 à Versailles. Un statut de pionnier, avec Pau. Mais le maire, François de Mazières, entend en rester, pour l’instant, à cette phase expérimentale. « Il y a deux handicaps aux bus à hydrogène : ils sont beaucoup plus chers, et, sur notre réseau, la fiabilité n’a pas toujours été au rendez-vous. Les piles à combustible n’ont pas été pleinement opérationnelles au début, même si les choses s’améliorent. » La présence du centre de recherche d’Air Liquide à Versailles Grand Parc a « facilité cette décision d’expérimentation, car nous avons une solution d’alimentation à proximité ». D’après l’élu, le grain environnemental de la technologie hydrogène n’est en effet pas automatique. « Tout dépend si l’hydrogène est produit sur place ou vient de loin. »
Montpellier annule une commande de 51 bus à hydrogène
En janvier, Michaël Delafosse, maire de Montpellier et président de Montpellier Méditerranée Métropole, annonce l’abandon du projet d’acquisition de 51 bus à hydrogène destinés aux futures lignes de bus à haut niveau de service (BHNS). Pour privilégier au final un réseau de bus électriques à batteries. « La technologie hydrogène est prometteuse, déclare Michaël Delafosse*. Mais nous étions aidés sur l’investissement (à hauteur de 29 M€, NDLR), et non pas sur le fonctionnement.
Or, celui-ci serait revenu six fois plus cher qu’avec des bus électriques à batteries. Donc, pour le moment, nous renonçons aux bus à hydrogène, on verra en 2030 si l’hydrogène est moins cher. » Une autre explication est esquissée par ailleurs chez EDF : la question du timing de livraison qui ne serait pas assurée dans des délais raisonnables pour une mise en service avant la prochaine échéance de 2026.
*La Tribune, janvier 2022.