Les greentech françaises font preuve d’une créativité foisonnante
Énergie, climat, gestion de l’eau ou chimie verte : les greentech font feu de tout bois pour apporter des réponses aux défis environnementaux. Avec un fil rouge qui relie la plupart des projets : réduire les émissions de CO2.
eLichens produit des détecteurs de gaz et des boîtiers de mesure de l’air ambiant. La start-up a déjà assemblé 2 000 boîtiers « intelligents » dans son usine de Grenoble, et elle vient de sortir un nouveau boîtier de mesure des concentrations de CO2, pour évaluer les niveaux de confinement des espaces intérieurs. Après avoir levé 12 millions d’euros en trois phases, eLichens vise aujourd’hui le marché européen et américain, où elle est déjà présente avec son produit phare, un détecteur de méthane.
RegenBox a mis au point le premier régénérateur « open source » de piles alcalines à usage unique, une innovation qui lutte contre l’obsolescence programmée des piles jetables et le volume de déchets toxiques. Ces piles, dont les plus courantes sont les LR6 et LR3, sont normalement non rechargeables, mais RegenBox a inventé un moyen de les régénérer grâce à des pulsions microélectriques. Son utilisation est très simple : il suffit de glisser les piles dans la RegenBox branchée sur une source électrique.
Lancey Energy Storage fabrique des radiateurs électriques connectés, équipés de batteries au lithium. Celles-ci se chargent pendant les heures creuses et réinjectent l’énergie stockée dans le réseau électrique d’un bâtiment pour alimenter d’autres appareils. Une solution d’autoconsommation complète et bon marché qui a été labellisée Solar Impulse. En 2020, Lancey a levé 8 millions d’euros pour la développer.
Lhyfe a inauguré une unité de production industrielle de 300 kg d’hydrogène par jour en Vendée, fin septembre 2021. L’hydrogène est produit par électrolyse de l’eau salée, au pied d’éoliennes, en gérant les fluctuations de la production de l’électricité. Grâce à un premier investissement de 10 millions d’euros, Lhyfe alimentera les bennes et bus de collectivités voisines et des véhicules utilitaires d’entreprises locales. À l’été 2021, Lhyfe a bouclé une levée de fonds de 50 millions d’euros pour développer son réseau international et miser sur la production d’hydrogène en mer à partir de l’électricité des éoliennes offshore.
Revcoo est une technologie brevetée de captation du CO2 par cryogénie, grâce à une installation branchée sur les cheminées d’usine. L’équipement fonctionne comme un canon à neige : une buse envoie de l’azote liquide froid dans la colonne de fumée, pour geler le CO2 qui est récupéré sous forme de flocons. Revcoo ne crée aucun déchet et n’emploie aucun consommable : l’azote liquide provient de l’azote présent naturellement dans l’air ambiant. En avril 2021, le premier démonstrateur a été installé sur un four à chaux du groupe Eiffage, dans le Nord, pour une production de 2 tonnes par jour.
Climeworks, une greentech suisse, a ouvert en septembre 2021 une usine qui aspire le CO2 présent dans l’air et le pétrifie dans la roche. Cette usine, baptisée Orca, est située près de Reykjavik, en Islande. Le principe : douze ventilateurs équipés de filtres, dont l’énergie est fournie par la centrale d’électricité renouvelable voisine, aspirent l’air et isolent le gaz carbonique. L’usine peut capter jusqu’à 4 000 tonnes de CO2 par an, ce qui correspond aux émissions liées à la consommation annuelle de 870 voitures.
Ressource en eau : nano-filtration et optimisation
Flovea produit des solutions de plomberie préfabriquées et connectées pour les professionnels de la construction. Son système hydraulique Flowbox Interactive, connecté à une application mobile dédiée, détecte les fuites d’eau et prévient l’utilisateur qui pourra fermer à distance les vannes concernées. La greentech a été sélectionnée par la région Nouvelle-Aquitaine pour participer au CES à Las Vegas en 2022.
Nereus, une start-up de l’Hérault, a mis au point une machine qui filtre les eaux usées par nano-filtration, et retient les virus et les bactéries grâce à ses membranes en céramique. Cette innovation a séduit la société de livraison des ouvrages des Jeux olympiques de Paris 2024, qui a commandé à Nereus une machine pour créer des îlots de fraîcheur dans le Village des athlètes. En 2022, Nereus annonce une levée de fonds comprise entre 5 et 7 millions d’euros, pour financer une augmentation de ses capacités de production.
Telaqua a développé une application pour optimiser l’irrigation des cultures avec un simple smartphone, à l’aide d’algorithmes qui modélisent en temps réel les fluctuations de pression de l’eau. Cette start-up d’Aix-en-Provence commercialise ses solutions depuis 2020. En 2022, elle espère lever entre 2 et 4 millions d’euros pour accélérer son internationalisation autour du bassin méditerranéen et en Amérique du Sud.
Chimie verte : enzymes, acides et résidus
Carbios, greentech pionnière du recyclage biologique des résines polytéréphtalate d’éthylène (PET) par des enzymes, va construire la première usine du monde dédiée au recyclage du plastique à l’échelle industrielle. L’usine sera installée en Meurthe-et-Moselle, sur le site d’Indorama, le plus gros producteur mondial de PET, et elle créera 150 emplois, dont 70 dès le démarrage du site en 2025. Dans cette usine, les enzymes de Carbios décomposeront 50 000 tonnes de déchets plastiques par an en deux monomères de base du PET, les colorants et les additifs étant traités comme des déchets. Indorama repolymérisera ensuite ces monomères en fibres polyester pour emballages de qualité alimentaire. Pour ce projet, Carbios, qui a levé 114 millions d’euros en 2021, devrait investir 200 millions d’euros, dont 150 pour sa technologie C-Zyme.
Lactips a mis au point une résine recyclable et entièrement biodégradable à base de caséine, une protéine du lait, adaptée à la filière des matières plastiques. La start-up basée dans la Loire a levé 13 millions d’euros au printemps 2021 pour préparer son passage à la production industrielle.
Afyren a développé sept acides organiques biosourcés à partir de résidus de l’agriculture (betteraves, céréales), qui peuvent se substituer aux ingrédients issus du pétrole dans l’agroalimentaire, la cosmétique, l’aéronautique, la chimie fine… Introduite sur Euronext Growth en septembre 2021, la greentech clermontoise prévoit d’ouvrir une usine en Lorraine en 2022, un investissement de 80 millions d’euros.