L’ÉDITO DE THOMAS BONNEL
A première vue, la tech’ et le « green » ne font pas bon ménage. A tout le moins, la préoccupation légitime que suscitent les nouvelles technologies quant à leur impact environnemental – émissions de CO2, usage immodéré des terres et métaux rares, data-centers énergivores, etc. – ne contribue pas à ranger le numérique et les technologies associées au nombre des secteurs exemplaires en matière écologique. Le numérique, à lui seul, représente environ 2,5% de l’empreinte carbone de la France. Certes, moins que la moyenne mondiale (4%), maigre consolation.
Et pourtant, à la faveur de l’urgence climatique et de la prise de conscience, par le grand public et singulièrement les jeunes générations, de ce que seul un véritable changement de paradigme pourrait apporter des réponses satisfaisantes pour enrayer la mécanique d’une catastrophe environnementale annoncée, voilà que la tech se met au vert. Et surtout « au service » de l’environnement. Fait emblématique de cette petite révolution : les levées de fonds dans les greentech explosent depuis 2 ans, atteignant près de 1,5 Md € en France en 2020. Elles ont même doublé l’année dernière. Par ailleurs, l’éventail des secteurs concernés ne cesse de s’étendre : mobilité propre, construction durable, énergies renouvelables, environnement, chimie, ainsi que l’agriculture avec le développement de solutions innovantes pour l’ensilage permettant la réduction de pesticides, les intrants « verts » ou encore les ENR avec l’agrivoltaïsme.
Bien sûr, on peut se flatter d’avoir développé ces dernières années, en France, un écosystème favorable aux greentech, alignées derrière la bannière de la French Tech, d’y compter plus de 800 start-up et pas loin d’une trentaine de licornes (dont 3 sont des greentech). Les chiffres peuvent faire rêver. Mais gardons-nous de toute pensée magique. Comme le rappelle utilement Julie Ranty, directrice générale de Vivatech (p. 27), « le véritable problème, c’est la question des sorties (…). Il y a une tendance des start-up nées en Europe à passer sous pavillon américain ou asiatique ».
Ce qui pose, assez crûment, la question de notre capacité à retenir les talents. Voilà sans doute le défi qui reste à relever.