« De la ville attractive à la ville hospitalière »
Vous êtes responsable scientifique du programme POPSU Métropoles. De quoi s’agit-il ?
La Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines – POPSU – est un dispositif de recherche national qui vise à croiser les savoirs scientifiques et l’expertise opérationnelle pour mieux comprendre les évolutions des villes, grandes ou petites, au regard des transitions auxquelles elles sont confrontées. Le programme POPSU Métropoles s’appuie sur 15 métropoles regroupant chacune un consortium de chercheurs, d’élus, de professionnels de la « fabrique urbaine » et d’autres parties prenantes. Nous avons souhaité pouvoir construire un autre récit que celui de la métropole égoïste, prédatrice, qui capterait à son seul profit les ressources des territoires avoisinants et les moyens des politiques publiques, en identifiant comment ces grandes villes, conscientes de leurs vulnérabilités et de leurs dépendances, s’attachent à inscrire leur futur dans un jeu élargi d’interactions, créant et entretenant des relations de coopération avec des territoires périmétropolitains, en veillant également à la cohésion à l’intérieur de leur périmètre.
Comment cela peut-il se traduire demain ?
Les grandes agglomérations françaises s’inscrivent toutes dans des réalités territoriales spécifiques, gardons-nous donc des généralités.
Construire un autre récit
que celui de la métropole égoïste,
prédatrice.
Néanmoins, on observe un glissement de leur priorité, de l’attractivité vers leur habitabilité. Les métropoles se sont en partie construites sur des logiques de compétition. Elles ont développé des grands projets visant à accroître leur « performance » : elles ont cherché à se rendre plus visibles, au travers de bâtiments ou monuments signatures, d’événements culturels ou festifs, de grands équipements, d’une inscription revendiquée dans les réseaux de grande vitesse. Certaines d’entre elles, aujourd’hui, subissent les effets de cette attractivité : thrombose quotidienne des grands axes de circulation, gentrification, incapacité à loger des salariés qui pourtant répondent aux missions de service public, etc. Sans parler par endroits de la difficulté à construire des logements ou des équipements, imputable au malthusianisme de populations nouvellement installées peu enclines à partager avec d’autres la qualité de leur cadre de vie.
Est-ce à dire que les villes ne chercheront plus à être attractives ?
Elles définissent l’attractivité à l’aune d’autres finalités. L’arrivée à la tête de plusieurs grandes villes de maires issus du courant écologiste a accentué la remise en cause de certains attributs de la métropolisation. Des exécutifs affirment leur volonté d’arrêter ces grands projets, souhaitent limiter leur développement, manifestent leur intention d’engager une redistribution de la croissance démographique au profit des villes moyennes environnantes. On observe à bien des endroits un souci de mieux organiser la métropole du quotidien, de faire en sorte qu’elle reste populaire, c’est-à-dire habitable par des ménages des classes moyennes, employées et ouvrières. Un des enjeux pour les métropoles demain est de redevenir habitables, et habitables pour tous.
* Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines