Nouvelle-Aquitaine • « Bordeaux métropole 2050 » : ambitions et limites d’une consultation de grande ampleur
En 2018, la capitale de Nouvelle-Aquitaine lançait une importante démarche de consultation à des fins de prospective urbaine. Qui a sans doute trouvé plus d’écho dans la population que chez les élus.
Sept grandes conférences thématiques, 36 débats, au moins autant de réunions de quartier, des hackathons, créathons, des expositions, un relais massif dans les écoles, collèges et lycées, une journée événementielle de restitution… Les concepteurs de l’opération « Bordeaux Métropole 2050 » n’auront pas lésiné sur les moyens. Une mobilisation à la hauteur de l’ambition de cette vaste démarche de prospective urbaine, initiée en 2018 par Alain Juppé, alors maire de Bordeaux et président de sa métropole.
Outiller la réflexion des élus
A la manœuvre, Michèle Laruë-Charlus, ex-directeur général de l’aménagement de la Ville de Bordeaux (de 2007 à 2016), puis de Bordeaux Métropole (de 2016 à 2017) et fondatrice d’Agora, biennale d’architecture, d’urbanisme et de design.
Un téléphérique
ne fait pas un projet
pour la métropole.
« L’idée n’était pas de livrer clé en main une projection du futur – qui aurait eu toutes les chances de se trouver rapidement démentie par les faits. Il s’agissait de livrer aux élus des 28 communes métropolitaines un matériau de réflexion et des pistes d’action pour dessiner de nouvelles lignes d’horizon à la métropole », raconte-t-elle. La démarche va toucher au total 120 000 habitants de la métropole (soit un citoyen sur sept), invités à explorer des projets plus ou moins iconoclastes : installation de « bains-bistrots » au pied des tours de Mériadeck, utilisation de trains-containers pour déplacer sa maison à volonté, création d’un téléphérique sur les boulevards, taxis-drones au départ de l’aéroport de Mérignac… Après dix-huit mois de consultation, 2 000 propositions seront identifiées, dont 450 ont servi à alimenter quatre grands scénarios : « La métropolisation au fil de l’eau qui s’auto-régule », « L’exigence décarbonée règle la ville », « La nature redessine la ville », « L’équilibre des territoires fait la vie ».
Une démarche d’intelligence collective
« Bordeaux-Métropole 2050 », qui s’est achevé au printemps 2019, a sans doute été la plus importante démarche de consultation à des fins de prospective urbaine menée en France. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Les maires de la métropole ont semble-t-il concentré leur intérêt vers les hypothèses les plus « politiquement consensuelles » : projet de métro ou de téléphérique. Lors de la présentation de son schéma des mobilités pour 2020-2030, la métropole a de fait affirmé son intérêt pour le téléphérique. « Un téléphérique ne fait pas un projet pour la métropole », commente Michèle Laruë-Charlus, regrettant que les présidents de métropole ne soient pas élus au suffrage universel direct, ce qui selon elle les engagerait davantage sur la voie de vrais projets politiques. Une opération pour rien ? Certainement pas, objecte celle qui est aujourd’hui consultante auprès de villes et d’institutions en France et à l’étranger. « #BM2050 a été une formidable démarche d’intelligence collective. Une consultation-concertation de cette ampleur a nécessairement un impact auprès de la population. Elle a d’ailleurs suscité l’intérêt d’autres grandes villes à l’international comme Madrid, Bruxelles, Stockholm et Buenos Aires. »