« Concentrer les efforts sur les actions à impact »
Le vent de critiques qui s’est abattu sur les ARS durant la crise est-il justifié ?
Avant la création des ARS en 2010, personne ne savait qui était responsable de quoi en matière de santé territoriale. Aujourd’hui, quand il y a un sujet de santé, a fortiori depuis la Covid, tout le monde se tourne vers les ARS. Si elles ont polarisé la critique, c’est avant tout parce qu’elles sont pour la première fois repérées et identifiées comme les acteurs centraux dans la gestion de la crise.
Il n’y a pas une plage,
pas une eau de baignade
que l’on ne contrôle pas.
Je ne veux pas dire que les ARS, tout comme les hôpitaux, n’ont pas été par endroits débordés. Qui ne l’aurait pas été face à une crise si inédite ? Mais ni leur légitimité ni leur pertinence ne sont remises en cause. D’ailleurs, le vent des critiques est sérieusement retombé. Le bilan de la France en matière de vaccination – qui est aussi le bilan des ARS – a fini de calmer les esprits les plus acerbes.
Comment répondez-vous sur le fond à ces critiques ?
Les élus locaux, notamment, nous ont reproché d’être coupés des territoires. Nous y sommes tous les jours ! 80% de la région Nouvelle-Aquitaine est couverte par un contrat local de santé. Il n’y pas une plage, pas une eau de baignade que l’on ne contrôle pas. La vraie préoccupation des élus, c’est le manque de généralistes sur leur territoire. Mais les médecins sont des libéraux, ils s’installent où ils veulent et les ARS sont ici relativement impuissantes. C’est d’ailleurs pourquoi j’ai lancé une réflexion sur la création d’un service public de la santé de premiers recours. On oublie également trop souvent que l’ARS n’est pas juste une administration, c’est aussi un organisme d’Assurance maladie. Décentraliser la gouvernance du système de santé, cela voudrait dire décentraliser l’Assurance maladie, avec tous les risques d’inégalités induits. Autre exemple : si l’on décide de redonner le secteur des politiques de santé aux préfets, comme cela a parfois été suggéré, on bascule de fait la gouvernance à l’échelle du département. Or, tous les départements ne disposent pas des mêmes armes.
Quels sont vos chantiers prioritaires ?
Les ARS sont des émanations de l’État, nos sujets sont ceux de l’État. Le gros sujet du moment reste la Covid : troisième dose de vaccin, grippes, bronchiolites et tensions hospitalières liées aux épidémies hivernales. Le deuxième grand chantier est la mise en œuvre du Ségur de la santé : nouvelles organisations, nouveaux systèmes de gouvernance des hôpitaux, déploiement des revalorisations salariales, investissements dans les hôpitaux et les Ehpad, etc. Autres sujets à l’ordre du jour : les réformes du financement de la psychiatrie, des urgences, des activités de soins de suite et de réadaptation (SSR), ainsi que le renouvellement du plan national santé et environnement (PNSS), le déploiement des CPTS, le développement du numérique en santé… L’impératif est de concentrer les efforts sur les actions à impact. Ce qui n’est pas simple car en santé, il n’existe pas d’indicateur global de performance. A côté de ces figures imposées, un directeur général d’ARS peut se saisir de sujets spécifiques. Outre la création d’un service public de premier recours, j’ai ouvert une série de réflexions autour de la refondation de la santé publique, ou encore de l’organisation d’un plan de décarbonation de l’offre de santé dans la région.