« Apprendre aux gens à penser à l’activité physique »

Quels sont les effets de la sédentarité sur la santé ?
Le constat est sans appel. En 40 ans, les jeunes de 9 à 16 ans ont perdu 25% de leurs capacités cardiovasculaires. Selon la Fédération française de cardiologie, là où un collégien moyen mettait 3 minutes pour courir 600 mètres en 1980, il en met 4 en 2020, soit une minute de plus. La surcharge pondérale chez les enfants devient catastrophique. Il y a les effets de la mauvaise alimentation, bien sûr, mais aussi de la sédentarité.
Faire bouger les enfants
motive leurs parents.
L’OMS recommande une heure d’activité physique par jour pour les enfants. Or, je vois trop de jeunes « prendre la forme du canapé », et être accompagnés en voiture par leurs parents, même sur de courtes distances. François Carré, cardiologue du sport, observe que beaucoup d’enfants ont parcouru à peine 50 pas dans la journée avant 10h, heure de la récréation matinale.
La crise sanitaire a-t-elle levé le voile sur ces enjeux de santé publique ?
Elle a en effet fait prendre conscience au grand public que les gens qui mouraient le plus à l’hôpital présentaient des comorbidités, notamment en matière d’obésité. Ceux qui avaient une bonne hygiène de vie avaient moins de chance statistique de se retrouver en réanimation.
Comment accélérer la prise de conscience ?
Nous allons communiquer sur les raisons de l’importance de bouger, sur le fait que l’on peut lutter contre les comorbidités. Il faut expliquer que l’activité physique adaptée améliore les aspects physiques et psychologiques, et augmente l’espérance de vie. Le collectif « Pour une France en forme » a élaboré des fiches très concrètes à l’attention des maires qui veulent mettre en mouvement leurs administrés. L’activité physique peut être encouragée par des équipements basiques : des panneaux indicateurs dans les villes, qui indiquent le nombre de minutes à pied pour se rendre à telle ou telle destination touristique ; des flèches visibles, au pied des escaliers, mentionnant le nombre de calories perdues si on les emprunte, et une flèche « 0 calorie » orientée vers l’ascenseur ou l’escalator. Il faut apprendre aux gens à penser à l’activité physique au quotidien.
Génération 2024 cible donc les sédentaires ?
Exactement. Ceux qui m’intéressent, ce sont ceux qui ne bougent pas ! En allant au-delà des JO Paris 2024. Nous préparons un programme d’actions pour 2022 et 2023, pour lutter contre la sédentarité. Un Français sur cinq est obèse. Je n’aimerais pas que la France devienne les États-Unis !
Le plan « 30 mn d’activité physique par jour à l’école » est-il un bon signal ?
Oui, car l’école joue un rôle très important. Si on arrive à faire bouger les enfants, ils vont motiver leurs parents.
La France manque d’équipements sportifs de proximité, observe l’AMF…
Et pourtant, il y en a ! Mais les gymnases, par exemple, ne servent qu’aux scolaires et aux associations sportives. Il faut les ouvrir à la population, en investissant dans le recrutement de gardiens.
Le sport sur ordonnance doit-il être pris en charge par la Sécurité sociale ?
À ce jour, le sport sur ordonnance n’est pas remboursé. Les médecins ont, de fait, du mal à prescrire. Il va falloir, un jour ou l’autre, que la CPAM accepte qu’un euro dépensé dans la prise en charge du sport, c’est beaucoup d’euros d’économisés, plus tard, dans la prise de charge de maladies. C’est le problème de la politique actuelle, un peu trop dans le court terme à mon sens, alors que la santé s’inscrit dans le long terme.