« Il va falloir trouver des solutions pour répondre à l’augmentation des primes »
Quels sont les principaux risques auxquels les assureurs et réassureurs vont devoir répondre ?
Au premier chef, le risque climatique, qui a sensiblement augmenté ces dernières années en termes de fréquence et d’intensité, avec des catastrophes naturelles à répétition (inondations, sécheresses, tempêtes). Nous sommes également très préoccupés par le risque cyber, que nous cernons beaucoup moins bien faute de recul, mais qui va devenir préoccupant en termes de sinistralité. Aujourd’hui, exception faite des États-Unis, qui ont de l’avance sur le reste du monde, le risque cyber est très peu assuré et très peu réassuré. Mais il est difficilement assurable, car c’est un risque susceptible de survenir au même moment partout dans le monde, avec des montants de sinistre tels qu’ils deviennent dissuasifs pour des sociétés financières. Pour cette même dimension systémique, le risque de pandémie est aussi au cœur de nos réflexions. Et puis, n’oublions pas les risques très émergents, même s’ils nous semblent encore lointains : la pollution, les nanoparticules, ou encore les irruptions solaires, dont les effets magnétiques peuvent perturber les systèmes électroniques.
Y a-t-il un modèle spécifiquement français de l’assurance et de la réassurance ?
La France est l’un des pays au monde où il existe le plus grand nombre d’assurances obligatoires. Le risque – exception faite du secteur agricole – y est donc bien assuré. Un exemple : plus de 90% des maisons sont assurées pour les catastrophes naturelles, contre seulement 10% en Italie. Pour leur part, les réassureurs interviennent pour couvrir les pics, c’est-à-dire les événements particulièrement catastrophiques. Et à de tels niveaux financiers, on ne peut équilibrer les risques qu’à une échelle planétaire. La France ne représente que 2,5% de la prime de réassurance du monde. Les réassureurs implantés en France sont aussi les plus grands réassureurs mondiaux. La seule véritable spécificité française, c’est le système dit CatNat de réassurance des catastrophes naturelles. En France, c’est l’État, par le truchement de la Caisse centrale de réassurance (CCR), qui couvre les risques inondation, séisme et sécheresse. Dans les autres pays, les grands risques naturels sont réassurés par des sociétés privées.
L’augmentation des risques interroge aussi vos entreprises et le modèle de financement de l’assurance…
Compte tenu de l’intensification des risques, les primes vont augmenter de telle façon que les assurés ne pourront plus en supporter le coût.
La branche dite CatNat
est sous pression depuis
plusieurs années.
Il va donc falloir trouver des solutions. On peut par exemple réfléchir à des offres moins “couvrantes”. Il faudra en tous cas travailler sur la prévention. Les besoins en fonds propres des assureurs et réassureurs vont aussi augmenter, car il faut couvrir nos propres risques. Il s’agit de trouver de nouvelles sources de financement. C’est déjà le cas. Un tiers de la capacité mondiale du risque catastrophes émane déjà de fonds en dehors de la sphère réassurantielle classique. Le régime des CatNat en France est sous pression depuis quelques années avec des résultats négatifs. Nous pouvons nous poser la question de l’assurabilité de certains risques et de leur financement (notamment les catastrophes naturelles). Il est probable que pour certains cas, il soit nécessaire de développer des solutions publiques/privées car les fonds propres des assureurs/réassureurs sont limités.