Risques majeurs : de la gestion à la prévention
Réputée plutôt performante dans la gestion des crises, la France le serait moins quand il s’agit de les prévenir. L’augmentation des risques majeurs la place en tout cas face à de réels choix politiques.
Les conséquences d’une tempête ou d’une inondation, d’un accident industriel ou d’un attentat terroriste laissent des traces indélébiles chez les personnes directement touchées, mais s’estompent trop rapidement dans la mémoire collective. Or, la capacité d’une société à conserver la conscience des effets de tels événements est l’une des conditions de son aptitude à prévenir les phénomènes dramatiques futurs. C’est ce qu’on appelle la culture du risque, et plus spécialement des risques majeurs.
Toute catastrophe
est donc un risque qui se réalise.
Risque, risques majeurs… De quoi parle-t-on précisément ? Le risque est la confrontation, en un même lieu, d’un aléa (possibilité d’apparition d’un événement) avec des enjeux (dommages causés par cet événement aux personnes et aux biens). Le risque majeur, lui, traduit la rencontre d’un aléa et d’enjeux suffisamment importants pour dépasser les capacités de réaction de la société. Deux critères qualifient le risque majeur : sa faible fréquence et sa grande gravité. Ainsi, toute catastrophe est un risque qui se réalise. On distingue plusieurs familles de risques majeurs : les risques naturels (inondation, séisme, tempête, cyclone, sécheresse, mouvement de terrain, avalanche, feu de forêt, volcanisme), les risques technologiques (accident industriel, accident nucléaire, transport de matière dangereuse, rupture de barrage), les risques “humains” (terrorisme, conflits, défaillances et attaques informatiques), les risques sanitaires (épidémie, pandémie, pollution).
L’inondation, premier risque en France
Ces dernières décennies, a fortiori ces dix dernières années, certains risques majeurs ont trouvé un terrain propice d’expression. La pandémie de la Covid-19, bien sûr, a éprouvé de manière totalement inédite l’ensemble de la société. Les actes terroristes se sont multipliés. Et le réchauffement climatique s’est traduit par des catastrophes naturelles à répétition. Si la France est relativement épargnée par les catastrophes, les risques majeurs y sont patents. Un citoyen sur quatre et les deux tiers des communes sont exposés à au moins un risque naturel, notamment aux inondations par débordement de cours d’eau, principal risque national au titre du nombre de personnes concernées et du coût économique des catastrophes. Le risque de feux de forêt ne concerne “que” 6 000 communes (sur plus de quinze millions d’hectares de zones boisées), le risque de glissement de terrain 7 000 communes, avec, pour un tiers d’entre elles, un niveau très élevé de gravité. Les accidents technologiques majeurs (le pays compte 18 000 communes à risque technologique) se caractérisent également par une faible fréquence et par une gravité importante : nombreuses victimes, dommages importants aux biens et à l’environnement. L’Hexagone est par ailleurs tout particulièrement ciblé par les attaques terroristes. Entre les attentats commis par Mohammed Merah le 11 mars 2012 et février 2021, 56 attentats ont coûté la vie à 293 personnes. Selon la Fondation pour l’innovation politique, la France concentre à elle seule près de 44% des attentats islamistes commis en Europe. On entend souvent dire que la France est une bonne élève en matière de gestion des crises et un piètre modèle dans le registre de la prévention. Raisonnement sans doute un peu court. Car la gestion des risques répond à une double logique de traitement des crises et de prévention. La seconde constitue la charpente du premier et le premier le ciment de la seconde. C’est pourquoi la prévention des risques majeurs doit figurer au rang des priorités nationales autant que territoriales et locales. Les choses avancent. D’ici 2022, la France devrait se doter du cell broadcast, système d’alerte par SMS aux populations en cas de situation d’urgence. Mais, au-delà des mesures techniques, il faut que la prévention gagne la société tout entière, devienne un élément “naturel” de la responsabilité et du devoir citoyens, le socle d’une véritable culture du risque.
Les sept piliers de la prévention :
• Connaissance des phénomènes, de l’aléa et du risque.
• Surveillance, prévision et alerte.
• Information préventive et éducation des populations.
• Prise en compte des risques dans l’aménagement et l’urbanisme.
• Réduction de la vulnérabilité.
• Préparation et gestion de crise.
• Gestion de l’après-crise et retour d’expérience.