La lutte contre le chômage passe par nos poubelles
Avec leurs promesses d’emplois nombreux, pérennes, qualifiés et non-délocalisables, les perspectives de l’économie circulaire ont tout pour plaire aux territoires.
Près de Lens, dans le Pas-de-Calais, le site de l’ancienne usine métallurgique Metaleurop s’est transformé après dépollution en un écopôle : 18 entreprises spécialisées dans le traitement des déchets industriels y font travailler 370 personnes. À Cambrai, Hainaut Plast Industry a monté une filière de recyclage du PVB, une matière plastique présente dans les vitrages sécurisés (pare-brise), qui emploie une vingtaine de salariés. À Roubaix, la marque Gentle Factory a créé une trentaine d’emplois dans le secteur de la mode éco-responsable, à base de vêtements recyclés. Des entreprises de ce genre, la région Hauts-de-France en regorge, dans une dynamique entretenue par le conseil régional et le réseau d’entrepreneurs Rev3. Il faut dire que les perspectives sont optimistes : d’après une étude prospective de l’Ademe parue à l’automne 2020, 30 000 emplois pourraient être créés par l’économie circulaire dans la région d’ici 2030, dans les métiers du bâtiment, de la plasturgie, du textile et de l’alimentation.
Réparer crée
404 emplois
pour 10 000 tonnes
d’objets usagés.
Mais les Hauts-de-France n’ont pas l’exclusivité de l’économie circulaire. D’après une étude de France Stratégie de 2016, celle-ci pourrait générer 800 000 emplois en France. Le potentiel de création d’emplois du seul recyclage des déchets est 6 fois plus élevé que celui de la valorisation énergétique, et 25 fois plus que celui de la mise en décharge, indique le ministère de la Transition écologique. Celui de la réparation et de la réutilisation est évalué à « 404 emplois pour 10 000 tonnes de déchets », selon un rapport de l’ONG Gaïa paru en avril 2021. Avec ses dispositions sur les achats publics et les fonds de réparation des éco-organismes, la loi AGEC ajouterait quelque 300 000 emplois supplémentaires.
Allonger la durée d’usage pourrait créer 230 000 emplois
Les emplois de l’économie circulaire présentent l’avantage d’être pérennes, non-délocalisables et même qualifiés. Mais les perspectives diffèrent selon les activités : la collecte et le tri sont difficiles à automatiser, en particulier dans le textile, et donc à forte intensité de main-d’œuvre ; le démantèlement, à l’inverse, en requiert peu. Les activités liées à l’allongement de la durée d’usage, comme la réparation et la réutilisation, sont prometteuses, avec 230 000 emplois potentiels. Le reconditionnement des appareils électroniques, qui est en train de se structurer en filière industrielle, attire aussi bien des startups, comme Back Market, qui emploie 400 personnes et a réalisé un chiffre d’affaires de 96 millions d’euros en 2020, que des structures de l’économie sociale et solidaire (ESS), comme Smaart, qui fait travailler une centaine de personnes dans l’Hérault.
Le secteur de l’ESS, justement, est particulièrement actif dans la prévention et le réemploi, où il fait travailler 21 000 personnes sur les 34 000 emplois de ce secteur, dans une myriade de petites structures locales, mais aussi dans de grands réseaux comme Emmaüs, la Fédération Envie, les Ateliers du bocage. Malgré son dynamisme, ce secteur a été fragilisé par la crise sanitaire : en septembre 2020, le gouvernement a débloqué une aide d’urgence de 10 millions d’euros dans le cadre du plan France Relance pour lui venir en aide.