« Cette loi va transformer nos vies dans les prochaines années »
En quoi la loi AGEC est-elle une loi importante ?
C’est une loi majeure du quinquennat qui va modifier en profondeur notre manière de produire et de consommer. La dernière grande loi sur la gestion des déchets datait de 1975. Cette nouvelle loi réorganise les filières REP et double leur nombre. C’est considérable. Elle fixe des objectifs ambitieux de gestion et de prévention des déchets pour les vingt prochaines années, comme celui de tendre vers 100% de plastique recyclé d’ici 2025. Elle favorise aussi le réemploi et la réparation pour mettre fin au gaspillage. Je suis certaine qu’elle aura un impact fort sur nos vies dans les prochaines années.
Les territoires sont les artisans du succès de cette loi.
Quels moyens sont prévus pour qu’elle tienne ses promesses dans les territoires ?
Les territoires sont les artisans du succès de cette loi. Les régions coordonnent les actions conduites par les acteurs de l’économie circulaire. Les collectivités territoriales deviennent membres du Comité des parties prenantes des éco-organismes pour améliorer le dialogue entre producteurs et territoires. Nous avons insisté sur le principe de proximité pour favoriser la gestion locale des déchets et la création d’emplois dans les territoires. Nous avons aussi renforcé les pouvoirs des maires pour lutter contre les dépôts sauvages, et fait en sorte que les amendes qui les sanctionnent restent dans les collectivités.
Comment suivez-vous son application ?
Une première évaluation a eu lieu six mois après la promulgation, une autre aura lieu au bout de deux ans. La centaine de mesures de la loi nécessite de nombreux textes réglementaires d’application, et fin mars 2021, plus d’un tiers des textes étaient publiés. Même s’il reste du chemin à parcourir, j’ai bon espoir que ces textes produisent des effets rapidement. Mais je crains que la crise sanitaire ne fausse l’évaluation de la loi l’année prochaine, quand il faudra mesurer les efforts fournis par les cafés, les hôtels et les restaurateurs en matière de réutilisation.
Quels effets peut-on en attendre sur la production et la consommation ?
Depuis 1975, nous ne nous attachions à la fin de vie d’un produit que lorsqu’il avait le statut de « déchet », qu’il fallait traiter. La loi AGEC oblige à prendre en compte l’ensemble du cycle de vie du produit. Plusieurs dispositions vont avoir un impact important sur la conception, comme l’obligation d’intégrer de la matière première recyclée. Elles pousseront les concepteurs à renforcer les performances environnementales de leurs produits, pour qu’ils soient plus durables, plus réparables et plus réemployables. Quant aux consommateurs, ils seront mieux informés grâce à l’indice de réparabilité et à l’affichage de la disponibilité des pièces détachées.
La loi Climat et résilience ne risque-t-elle pas de brouiller les ambitions de la loi AGEC ?
Il est clair que cette nouvelle loi va bousculer certaines dispositions de la loi AGEC. La Convention citoyenne pour le climat s’est réunie en même temps que nous débattions de la loi sur l’économie circulaire, et elle a abordé plusieurs points sur lesquels nous avions déjà rendu des arbitrages, comme l’affichage environnemental et social, la consigne, etc. Mais on ne devrait pas promulguer une loi en février 2020 pour bouger tous les curseurs un an après !