Les villes moyennes aux avant-postes
Partout en France, les villes moyennes tentent de rebondir sur l’essor du télétravail pour attirer sur leurs terres les habitants des grandes métropoles.
Tours, Alès, Évreux, Mazamet… Quel point commun entre toutes ces villes ? Elles ont toutes investi dans de l’espace publicitaire pour séduire les citadins fatigués des grandes métropoles. En creux de toutes ces campagnes de communication : « Venez chez nous, il y fait bon vivre et télétravailler ». Cette course au mieux-disant migratoire, antérieure à la crise de la Covid, amplifiée de manière exponentielle depuis, émane plutôt de villes moyennes, peu ou mal connues des grands urbains.
Le paysage concurrentiel est dense, il faut multiplier les arguments.
Comme le paysage concurrentiel est dense, il faut multiplier les arguments : géographie, transports, cadre de vie, présence de la nature, offre culturelle, couverture 4G et développement de la fibre. Faute de pouvoir vanter un exceptionnel trésor côté nature, Béthune mise par exemple sur l’argument numérique. La ville se revendique smart city collaborative, durable et innovante, mettant en avant La Fabrique, qui abrite un fablab et un espace de coworking. Il faut croire que ça marche. La cité connaît un rebond de son marché immobilier et a récemment ouvert un cinéma dans le centre-ville. A 450 kilomètres de là, Nevers s’est doté d’une direction de l’innovation et d’un incubateur numérique. La préfecture de la Nièvre a également signé avec l’État un pacte pour le déploiement de la 5 G. Pour faire valoir leurs atouts, les collectivités multiplient les supports et les formats : affiches dans les couloirs du métro, annonces dans les magazines économiques, posts sur les réseaux sociaux. Elles disposent également de plateformes d’information et de services comme Paris je te quitte (www.paris-jetequitte.com). Créé en 2015, ce site se propose d’accompagner les candidats au départ dans le choix de la ville d’accueil, mais aussi pour trouver un emploi et un logement sur place. Au lendemain du premier confinement, l’audience a bondi de 42% ! Un relais parmi d’autres de valorisation pour les territoires, à l’image d’Épernay, qui comme une trentaine d’autres villes de l’Hexagone, s’y est abonné début 2021.
Avantage aux villes connectées
Les économistes le savent bien, à une échelle géographique, la population « suit » l’emploi autant que l’emploi « suit » la population. Les ménages mobiles se localisent dans les zones où l’économie est prospère, et les entreprises créent de l’activité à proximité de la main-d’œuvre dont elles ont besoin. Si la pandémie et les confinements successifs favorisent une migration des cadres vers les villes moyennes, celle-ci profitera surtout aux villes connectées, aux métropoles ou comprenant de 200 000 à 400 000 habitants, qui ont déjà des populations de cadres importantes. Les villes moyennes doivent avant tout miser sur l’économie et non sur une éventuelle révolution démographique.
Pour les grandes villes, le jeu est plus facile. Beaucoup moins nombreuses, fortes d’une notoriété acquise et de ressources autrement substantielles, elles ont toutes depuis longtemps misé sur la liaison TGV avec Paris, le développement du très haut débit et les espaces de coworking. Lille compte ainsi un maillage étoffé de tiers-lieux. Dès 2013, Bordeaux a lancé son projet Darwin, qui regroupe dans une ancienne caserne un espace de coworking et deux pôles respectivement consacrés à l’économie créative et au développement durable. Depuis, une trentaine de tiers-lieux ont essaimé dans la cité girondine.