Quand la France accumule les cartons rouges
La Commission européenne multiplie les avertissements aux autorités françaises. En un an, Bruxelles a envoyé plusieurs lettres et mises en demeure sur la chasse, la pêche ou certaines pratiques interdites. Sans grand succès.
La lettre de rappel à l’ordre de la Commission européenne est arrivée sur le bureau du ministre de l’Agriculture français au début du mois de mars 2020. Il s’agissait une fois encore de rappeler les directives européennes sur l’élevage porcin, datant de 1994, interdisant formellement la caudectomie. Pourquoi la France fait-elle la sourde oreille ? Parce que 95 % des porcs sont élevés en système intensif et que dans ces conditions, très difficiles, les bêtes entassées les unes contre les autres finissent par se mutiler entre elles et mangent la queue de leurs congénères. C’est un phénomène bien connu des vétérinaires, qui évoquent de nombreuses infections et des conditions sanitaires déplorables. Pour y remédier, la France autorise toujours les éleveurs à couper la queue des jeunes porcs, sans analgésique, quelque temps après leur naissance. Ce que l’on appelle la caudectomie, une pratique évaluée à 99 % du cheptel dans notre territoire. Ce qui a fait bondir Bruxelles.
Il faut dire que Paris n’en est pas à son premier carton rouge. Notre pays fait même figure de mauvais élève en matière de condition animale.
Certaines pratiques de chasse agacent au plus haut point.
Au mois de juillet 2020, l’institution européenne publiait un communiqué dans lequel elle constatait « un certain nombre de lacunes dans la législation française concernant l’origine des animaux utilisés à des fins scientifiques ». Cette fois, il s’agissait de pointer nos lacunes en termes de transposition des directives bruxelloises sur le sujet ô combien sensible de l’expérimentation animale.
C’est ainsi, Paris reçoit très régulièrement des rappels à l’ordre, voire des mises en demeure. Toujours en 2020, cette fois au mois de mai, la Commission a tapé du poing sur la table en envoyant une deuxième missive à Paris – la première étant restée lettre morte – pour exiger que la France lutte efficacement contre les « échouages de dauphins », autrement dit les prises accidentelles de ces mammifères marins dans les filets de pêche. Bruxelles demandait alors que la France mette enfin en œuvre la directive « Habitats » afin d’éviter « les prises accessoires non durables d’espèces de dauphins et de marsouins par les navires », particulièrement sur la côte atlantique. Une pêche estimée à plus de 1 000 animaux sur l’année 2019. Or il existe, et Bruxelles le rappelle, des filets – dénommés des « pingers » – qui permettent à ces espèces de s’échapper. Comme il existe également des répulsifs acoustiques. Mais les pêcheurs, ainsi que les autorités françaises, résistent et n’ont toujours pas généralisé de tels dispositifs, contrairement aux directives.
Enfin, ce qui agace au plus haut point nos voisins européens reste certaines pratiques de chasse « traditionnelles ». Et l’été dernier, en juillet 2020, la Commission a rappelé dans sa note à Paris que la directive « Oiseaux » interdit « plusieurs méthodes de capture, comme la colle pour les grives et les filets et pièges pour les alouettes et les pigeons, qui ne sont pas des méthodes sélectives ».
Autant de rappels à l’ordre, de cartons rouges et de mises en demeure qui ne font pour le moment pas franchement vaciller les autorités françaises.