« On arrive à faire bouger les choses »
Qu’est-ce que l’on entend par « bien-être animal » ?
On parle des animaux qui sont sous la garde de l’homme, et il y a une vraie différence entre la bientraitance, c’est-à-dire la mise à l’abri de la faim, de la soif, du froid… et le bien-être, qui est le plus important, car il s’agit de laisser à l’animal la possibilité d’exprimer ses comportements naturels, individuels et sociaux. Or ce bien-être entre parfois en conflit avec l’intérêt de l’homme…
Vous pensez à quoi ?
Eh bien, pour les animaux d’élevage par exemple, que l’on appelle aussi les animaux de rente, il y a souvent une contrainte économique. En France, hors poissons, on abat un milliard d’animaux par an dont 900 millions de poulets, c’est une énorme industrie.
Il faut permettre au consommateur de faire un choix éclairé.
Bien sûr, il y a désormais des poulets qui ont un « haut niveau de bien-être », qui accèdent au plein air, ont de l’espace pour vivre, une alimentation équilibrée… mais ces poulets coûtent deux fois plus cher à produire que les premiers prix. Et nos agriculteurs, qui ne sont pas des gens qui font fortune, font souvent face à un dilemme, privilégier le bien-être de leur élevage… ou leur propre fin de mois. Ils sont favorables au bien-être animal, mais n’ont pas toujours le choix. Surtout quand l’acheteur n’est pas prêt à payer plus cher pour son produit.
Il faut donc aider les éleveurs à se transformer ?
Oui, car dans certains cas, cela exige des surcoûts de fonctionnement et des investissements importants. D’ailleurs, dans la nouvelle PAC, il est explicitement prévu qu’une partie des crédits doivent aller à l’amélioration des conditions de vie des animaux. Concrètement, pour un élevage de porcs, cela veut dire de nouvelles maternités pour les truies, davantage d’espace pour les cochons afin qu’ils ne deviennent pas si agressifs et qu’ils ne se blessent entre eux… Vous savez, c’est comme dans une prison, des conditions de vie intenables créent des comportements épouvantables.
Mieux informer le consommateur également ?
Exactement. Il faut lui permettre de faire un choix éclairé, en accord avec ses convictions. Qu’il y ait une traçabilité. On l’a parfaitement réussi avec les œufs. Aujourd’hui, un consommateur ne veut plus acheter d’œufs qui proviennent de poules en cages. D’où le rôle de l’étiquetage dont nous sommes à l’origine.
Vos grands défis ?
J’aimerais que les articles de notre Déclaration des droits de l’animal (voir ci-contre) entrent dans le droit positif. On n’en est pas si loin, on a déjà pas mal progressé. Et puis j’ai l’ambition d’améliorer la condition des animaux d’élevage par la généralisation de l’étiquetage, avec certains partenaires. Carrefour
par exemple a indiqué qu’à l’horizon 2025, il ne vendrait plus sous son nom un seul poulet élevé dans des conditions qui ne respectent pas son bien-être. C’était inimaginable il y a quelques années, mais aujourd’hui, on arrive à faire bouger les choses.
Pourquoi vous êtes-vous engagé dans cette cause ?
C’est la rencontre entre une conviction ancienne et l’opportunité de passer à l’action. La différence entre savoir… et faire. Et j’ai la chance de mener un combat pour une cause à laquelle j’ai toujours cru.