Afrique : Le Kenya promeut l’économie bleue durable
Le pays croit en l’exploitation de son potentiel maritime pour une transition économique durable et l’ensemble de l’Union africaine veut lui emboîter le pas.
En accueillant en 2018 16 000 délégués de 184 pays pour la première Sustainable Blue Economy Conference, Nairobi s’est distingué comme un apôtre de l’économie bleue. Le pays, qui compte un ministère de l’Economie bleue et de la Pêche, a investi 100 millions de dollars dans les pêcheries durables et la diversification des revenus des communautés côtières. Il a également intégré le carbone bleu dans ses « contributions déterminées au niveau national » (les objectifs de l’Accord de Paris). Et un Centre d’excellence pour l’économie bleue en Afrique de l’Est de 16 hectares est en projet à Kwale.
« Une Afrique prospère fondée sur une croissance inclusive et un développement durable »
Sous l’impulsion kenyane, un an après ce sommet de Nairobi, l’Union africaine a diffusé sa « stratégie de l’économie bleue pour l’Afrique », dans le cadre de l’Agenda 2063. Cette stratégie définit le développement de l’économie bleue comme un objectif prioritaire pour « une Afrique prospère fondée sur une croissance inclusive et un développement durable. » Elle renforce l’engagement des Etats africains en direction de l’ODD 14 (Objectif de développement durable en faveur de la vie aquatique des Nations unies) et constitue un changement de paradigme. La stratégie repose sur des vecteurs tels que le développement de l’offre portuaire, la coopération maritime, la conservation des écosystèmes, mais aussi l’exploitation des ressources minières des fonds marins.
5 % de la population active africaine travaillera dans le maritime en 2063.
Une étude publiée dans Frontiers in Marine Science en juillet 2020, analysant des projets d’économie bleue en Afrique, s’alarme d’une vision trop « économique » et pas assez « durable » de cette stratégie et des impacts négatifs sur les communautés traditionnelles pour le profit de grandes entreprises. L’Afrique compte 38 Etats côtiers et insulaires, un littoral de plus de 47 000 km, 13 millions de km2 de territoires océaniques et est désormais déterminée à exploiter pleinement le potentiel de ses ressources aquatiques. Et notamment le carbone bleu. A l’échelle du continent, la valeur monétaire du service de séquestration du carbone par les mangroves, les marais salants et les herbiers est estimée à 40 milliards de dollars (2018) avec un potentiel de 70 milliards en 2063. L’ensemble de l’économie bleue africaine génère aujourd’hui 296 milliards de dollars et 49 millions d’emplois. Les projections à l’horizon 2063 tablent sur 576 milliards de dollars et 78 millions d’emplois, soit 5 % de la population active. Si le potentiel est immense, les défis climatiques et environnementaux s’ajoutent à des obstacles institutionnels, sécuritaires et de gouvernance. Le continent fait face à une pêche illégale massive : 25 % des captures seraient réalisées par des pays non-africains, générant une perte de 3,3 milliards de dollars par an (FAO, 2014).