Renforcer la fonction ressources humaines dans la fonction publique d’État
La réflexion sur l’emploi public suscite-t-elle toujours des antagonismes ?
Le débat autour de la fonction publique est plus serein qu’il n’a pu l’être dans le passé. Le discours stigmatisant une fonction publique qui serait dépensière autant qu’inefficiente trouve moins d’écho aujourd’hui. L’ensemble des corps socio-professionnels travaille de facto en étroite collaboration avec des fonctionnaires. Et si nul ne conteste le fait que la fonction publique doive évoluer pour s’adapter à la contrainte économique ainsi qu’aux nouveaux défis d’une société de plus en plus complexe, de plus en plus fracturée et de plus en plus individualiste, rien ne fait apparaître que ses principes fondateurs (égalité, indépendance, responsabilité) constitueraient des freins à la prise en compte de ces enjeux. A cet égard, la déclaration du groupe des professions libérales – a priori peu suspectes de fanatisme administratif – dans l’avis du CESE sur l’évolution de la fonction publique de 2017 est significatif. Le groupe affirme clairement partager l’avis du Conseil quant à la “robustesse” du statut de la fonction publique et sa modernité au travers de la notion de “fonctionnaire citoyen”.
Quels sont les grands défis RH auxquels doit faire face l’emploi public ?
Dans la fonction publique d’État, la gestion des carrières pâtit d’un manque de suivi personnalisé des agents dans leur parcours professionnel spécifique. L’accompagnement des fonctionnaires dans le travail d’anticipation de l’évolution de leurs compétences s’avère particulièrement défectueux dans les ministères dont les personnels travaillent à distance des responsables RH des services déconcentrés.
La fonction RH, souvent, n’a aucun visage.
Le renforcement de la fonction ressources humaines dans la fonction publique d’État apparaît de ce fait comme une nécessité. Au CESE, nous avons été frappés par le fait que la fonction RH, souvent, n’a aucun visage, pas de réalité concrète, ni pour les agents, ni même pour leurs managers. Dans l’Éducation nationale, par exemple, la plupart du temps, aucun référent RH n’est identifié par les enseignants.
Quid de la transformation des métiers ?
La fonction publique va voir ses métiers se transformer, certains disparaître, d’autres émerger. Elle doit donc s’organiser, se structurer pour répondre à ces changements. Il s’agit dès lors d’identifier les futurs métiers et compétences et de les référencer. Et, bien sûr, de construire et diffuser une offre de formation en cohérence avec les besoins des services. De ce point de vue, autant la fonction publique territoriale est outillée avec le CNFPT, autant la fonction publique d’État est dépourvue d’un instrument adapté. Si l’on veut que les dispositifs de mobilité et que les actions de formation dans l’emploi public fonctionnent, il serait pertinent de créer à l’échelle de l’État une structure similaire au CNFPT et de faire en sorte que les deux entités travaillent en étroite coopération. C’est en tout cas l’une des propositions émises par le CESE. Elle n’a pas été suivie d’effet dans la loi du 6 août 2019, c’est dommage.
* Co-auteur de deux avis du CESE : “L’évolution de la fonction publique et des principes qui la régissent” (2017) et “Évolution des métiers de la fonction publique” (2018)