Employeurs territoriaux recherchent activement nouvelles compétences
Si la fonction publique territoriale voit ses effectifs diminuer légèrement, elle doit composer avec l’élargissement du champ de ses compétences. Pour les employeurs, il s’agit de conjuguer intégration, recrutement, formation… et budgets en berne.
Entre fin 2017 et fin 2018, le nombre d’agents de la fonction publique territoriale a légèrement diminué (- 0,8 %). Une baisse qui confirme celle de l’année précédente (- 0,4 %) et que l’on peut en grande partie imputer au fort repli des contrats aidés (- 43,1 %). Hors contrats aidés, les effectifs progressent en effet de 0,7 %. En parallèle, le nombre d’agents contractuels augmente de 3,9 %.
Aujourd’hui, 54 % des agents territoriaux travaillent dans les communes, 22 % dans les établissements communaux et intercommunaux, 15 % dans les départements, 4 % dans les établissements départementaux et 5 % dans les régions. L’équilibre des effectifs territoriaux d’aujourd’hui a connu en trente ans des changements significatifs. Les lois de décentralisation menées en France depuis les années 1980 ont en effet profondément modifié l’organisation des compétences en matière de services rendus à la population. Et ce, sur des marqueurs à la fois sensibles pour les administrés et déterminants pour l’équilibre des territoires : les politiques sociales ciblant les publics en difficulté ont échu aux départements ; l’éducation s’est trouvée répartie entre les communes (écoles primaires), les départements (collèges) et les régions (lycées) ; l’ancien réseau routier national a été transféré aux départements, et l’organisation du transport ferroviaire aux régions.
Importantes migrations d’effectifs
Ces transferts de compétences se sont accompagnés d’importantes migrations de personnels de la fonction publique de l’État vers la fonction publique territoriale. Entre 2007 et 2010, 140 000 agents ont changé d’employeur. Pour les collectivités, il s’est agi d’intégrer ces nouveaux effectifs, d’ajuster leurs dépenses de personnel (entre 2006 et 2010, la masse salariale des régions a été plus que triplée), d’engager de profondes réorganisations de leurs services.
Entre 2007 et 2010, 140 000 agents ont changé d’employeur.
Les réaffectations de compétences et d’effectifs n’empêchent pas les employeurs territoriaux de recruter. La cinquième édition du Baromètre des ressources humaines de la fonction publique territoriale pointe pour 2019 des perspectives de recrutement en légère progression : 38 % des collectivités (+ 2 % vs 2018) envisagent de recruter prochainement, notamment au sein des départements, des régions, des communes de plus de 20 000 habitants et des communautés de communes. Cette tendance, très nette en particulier dans le domaine du développement durable (+ 9 points par rapport à 2018), s’explique principalement par le remplacement des départs en retraite dont le volume demeure important.
Métiers en tension
Les stratégies d’embauche des employeurs doivent composer avec de réelles tensions, tout particulièrement sur les métiers d’enseignant artistique, de policier municipal, de secrétaire de mairie, de travailleur social, d’animateur éducatif d’accompagnement périscolaire.
Les dépenses consacrées à la formation, elles, sont stables pour près de huit collectivités sur dix. Les augmentations de budget concernent principalement les collectivités de taille importante : régions (+ 17 points), départements (+ 13 points), communes de 20 000 habitants et plus (+ 14 points). Les transferts massifs de compétences avec lesquels ont dû composer les collectivités, ainsi que les adaptations qu’elles ont consenties pour accompagner la transformation de l’emploi à l’échelle de leur territoire, témoignent de l’ampleur de l’enjeu auquel elles vont devoir faire face : investir dans des compétences à la hausse, dans un contexte budgétaire à la baisse.
De fortes disparités entre les territoires
Une étude approfondie publiée en juin 2019 par France Stratégie montre que le taux d’administration de la fonction publique territoriale s’élève à 25,9 agents pour 1 000 habitants. Mais cette moyenne cache des écarts significatifs. Il est ainsi considérablement plus élevé dans les DOM (35,7).
Selon l’organisme gouvernemental, la répartition de la fonction publique territoriale hors Ile-de-France est marquée par un certain héliotropisme. En métropole, la Corse, région la mieux pourvue (35,9 pour mille), devance la région PACA (30,4), mais creuse l’écart avec la région Grand-Est, “lanterne rouge” du classement (20,4).
Les écarts entre départements sont encore bien plus importants. Hors DOM et Corse, le rapport est en particulier de plus que deux à un entre les Landes (34,1) et l’Ain (16,4).
L’étude de France Stratégie note cependant que la répartition des emplois « locaux » des collectivités territoriales (c’est-à-dire hors services centraux des régions et départements) est plus homogène au niveau de la zone d’emploi. Une analyse économétrique montre que les taux d’administration sont surtout déterminés par trois paramètres : la taille de l’agglomération principale de la zone d’emploi, sa richesse (mesurée par son “potentiel financier”), enfin un clivage entre d’un côté le sud de la France et l’Ile-de-France, et de l’autre côté le reste du territoire.