La Suède fixe l’échéance de la neutralité à 2045
Précurseur en matière de taxation carbone dès les années 1990, la Suède fait partie des pays industrialisés les plus avancés en matière de transition bas-carbone. La neutralité carbone y rime avec croissance.
Dès 1991, la Suède a décidé d’engager une stratégie bas-carbone, notamment en mettant en œuvre par la suite une taxation du carbone. Ainsi, entre 1990 et 2011, le pays a réduit ses rejets carbonés de 16 %, recul qui a atteint près de 28 % en 2017, tout en enregistrant une croissance de 57 % de son PIB. Signataire de l’accord de Paris en 2015, la Suède a transcrit celui-ci dans une loi-cadre en 2017, avec application dès 2018, et l’objectif de neutralité carbone en 2045.
Un mix électrique nucléaire/hydraulique déjà largement décarboné.
Elle oblige le gouvernement à mener une politique en cohérence (notamment au niveau de son budget) avec les objectifs climatiques adoptés par le Parlement. Un Conseil du climat, constitué d’experts indépendants, est chargé du contrôle des actions. Cet objectif suppose une forte réduction des émissions domestiques (de 75 % par rapport à 1990) et une « compensation possible via du stockage forestier ou des réductions d’émissions à l’étranger ». Il est certes difficile à atteindre, mais favorisé par le faible recours aux énergies fossiles dans le bilan énergétique (40 %) grâce à l’électricité décarbonée et au chauffage largement fondé sur la cogénération à partir d’énergies renouvelables (ENR).
Un changement d’usage facilité par l’électricité
Les bonnes performances de la Suède en matière d’émissions de CO2 reposent sur la quasi-neutralité carbone de son électricité. Deux sources – hydraulique et nucléaire – se partagent 80 % de la production d’électricité. L’éolien pèse désormais pour un peu plus de 10 %, et la biomasse et les déchets font le complément. Fondateur du marché nordique de l’électricité, la Suède exporte du courant, notamment en Finlande. Grâce à cette électricité bas-carbone, le pays a pu engager un véritable transfert d’usages des fossiles vers ce vecteur. L’industrie, secteur le plus énergivore, a une demande constituée à quasiment 80 % d’électricité et d’ENR thermique (chauffage et process). Electricité et ENR comptent pour plus de 90 % de la demande tertiaire et pour 98 % de celle du résidentiel. Les taxes sur l’énergie et sur le carbone permettent des réductions de charges pour les entreprises, des actions d’économie d’énergie et subventionnent même l’éolien. Reste la question des transports (80 % de la demande en produits pétroliers du pays). L’objectif est de réduire la part des fossiles de 70 % d’ici à 2030. Là encore, le recours à l’électricité est favorisé, avec de bons résultats. Mais le gouvernement a aussi misé sur les biocarburants (22 % des carburants utilisés).
Une proximité avec la démarche française
Comme la France, le mix électrique suédois est largement décarboné. Côté nucléaire, la loi suédoise ne permet plus de construire de nouveaux réacteurs, mais elle autorise à prolonger ceux qui existent et leur remplacement quand leur temps est venu. Comme en France (objectif 50 % de nucléaire dans le mix électrique), cela signifie un maintien d’une capacité nucléaire dans la durée. Enfin, la loi française énergie-climat de 2019 entérine le Haut Conseil pour le climat chargé tous les ans d’un suivi de la stratégie, qui ressemble beaucoup au Conseil du climat suédois.