L’impact de l’AMP sur l’enfant : une recherche en chantier
Stimulation hormonale, gamètes et embryons manipulés, cultivés, voire congelés… le processus d’AMP n’est pas anodin. « Cela entraîne un stress cellulaire et des modifications épigénétiques sur l’ADN », explique l’INSERM. Mais « à ce jour, ce phénomène n’a été corrélé à aucun sur-risque » pour l’enfant. C’est le cas pour le cancer, avec des résultats « plutôt rassurants ». Néanmoins, il est établi que les risques de prématurité sont plus élevés lorsque la fécondation a lieu dans une éprouvette. En outre, certains chercheurs, telle une équipe de l’université d’Australie occidentale (UWA), alertent sur des légers dysfonctionnements cardiovasculaires et métaboliques chez les enfants, comme une pression artérielle légèrement plus élevée. S’ils sont aujourd’hui très faibles, « ces facteurs de risque pourraient s’aggraver au cours du temps jusqu’à devenir responsables de maladies cardiovasculaires ou métaboliques », préviennent-ils. En 2002, une étude australienne mettait au jour des anomalies congénitales (malformations physiques présentes avant la naissance) plus fréquentes. Néanmoins, d’autres études la contredisent, en reliant ces risques non pas à la technique elle-même, mais à la plus forte fréquence de prématurité et de grossesses gémellaires ou triples dans le cadre d’une AMP, ou à l’âge, plus élevé, des mères. « Il y a peut-être une augmentation de certaines pathologies chez ces enfants, mais il est difficile de savoir si cela est lié à la FIV elle-même, au traitement donné ou à l’infertilité des parents », ajoute Charlotte Sonigo, chercheuse à l’INSERM.
Un faible suivi en France
Les recherches continuent donc, notamment sur « l’incidence du syndrome de Beckwith-Wiedemann ou celui d’Angelman, qui se manifeste entre autres par un déficit mental », explique l’INSERM. « Mais pour certaines maladies qui se révèlent à l’âge adulte, il faudra encore des années pour savoir, relève Charlotte Sonigo. Sans compter que les pathologies examinées sont souvent très rares, or il faut pouvoir comparer un grand nombre d’enfants pour montrer une éventuelle différence… »
Un stress cellulaire et des modifications épigénétiques sur l’ADN.
En France, le suivi est faible, contrairement au Danemark ou à la Suède. En cause notamment, des systèmes de registres peu performants, et des parents refusant un suivi après un parcours déjà lourd d’AMP. Plus fondamentalement, « une réflexion apparaît nécessaire concernant la conception de ce suivi, actuellement pris en charge par le milieu médical lui-même, alerte Bernard Jégou, directeur de recherche à l’École des hautes études en santé publique, sur le site de la fondation pour la recherche médicale. En effet, malgré le sérieux du travail réalisé, les médecins se trouvent, de fait, à la fois juges et parties, position qui ne favorise pas la mise en place d’un outil totalement adapté à l’ensemble des besoins. Il conviendrait donc d’attirer l’attention des pouvoirs publics sur cette situation ».
Une technique de FIV, vectrice de l’infertilité du père
Utilisée dans 68 % des tentatives de FIV, l’ICSI consiste à insérer directement, à l’aide d’une pipette, un spermatozoïde dans un ovule. Elle permet de contourner des cas d’infertilité masculine dans lesquels le nombre de spermatozoïdes est insuffisant en raison d’une anomalie génétique. Or on sait maintenant que cette anomalie risque d’être transmise à l’enfant ainsi conçu, et avec elle la stérilité de son père. Néanmoins, « cela n’entraîne pas particulièrement de questionnements, réagit Charlotte Sonigo, chercheuse à l’INSERM, puisque l’on considère que cet enfant pourra lui-même avoir accès aux techniques de procréation ».