« Une exigence à procréer qui entre en conflit, voire écrase les droits de l’enfant »
Quels sont les droits de l’enfant dans le domaine procréatif ?
Outre le droit à « une vie familiale normale », notion floue et relative, il y a surtout le droit de l’enfant de connaître ses origines. La CEDH met ainsi en avant « l’intérêt vital à obtenir des informations nécessaires à la découverte de la vérité concernant un aspect important de son identité personnelle, par exemple l’identité de ses géniteurs, ses origines », et a pu considérer que « la naissance et, singulièrement, les circonstances de celle-ci relèvent de la vie privée de l’enfant garantie par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme ».
Des enfants pourraient attaquer le contrat de procréation les concernant.
De même, l’article 7 de la Convention internationale des droits de l’enfant affirme que dès sa naissance, « l’enfant a le droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux ». Un principe gênant pour la France, où l’on donne la possibilité à une femme d’accoucher sous X, et où l’on autorise l’AMP avec tiers donneur, qui empêche l’enfant de connaître plus tard l’identité de son père par exemple [ce que change la nouvelle loi – ndlr]. Mais la convention précise « dans la mesure du possible » : en effet, on ne sait pas toujours qui est le parent et il faut aussi respecter la vie privée de celui qui a procréé. On peut même se demander dans certains cas qui est parent : celui qui fournit de l’ADN, la gestatrice, le donneur de gamètes, le commanditaire… Il peut y en avoir plus de 4 !
Y a-t-il des droits de l’enfant concernant son mode de conception ?
Ce droit pourrait relever des droits des générations futures. Ces derniers sont en germe notamment via le mouvement écologiste. Il s’agit de révéler que les actions d’un groupe social à un moment donné engagent parfois la vie, l’environnement, l’avenir d’autres groupes sociaux leur succédant. Les générations futures ont droit à ce qu’on ne détruise pas leur avenir, leur qualité de vie, volontairement ou par indifférence. Concernant la procréation, un enfant pourrait reprocher à la société, à l’origine volontaire de sa naissance, les modes opérationnels retenus qui auraient bafoué son intérêt et ses droits ; des enfants pourraient attaquer le contrat de procréation les concernant auprès de ses commanditaires ; d’autres, exiger que les donneurs soient aussi leurs parents, créant ainsi des situations de pluriparentalité, déjà examinées au Québec, en Ontario et en Colombie britannique.
Du côté des adultes, y a-t-il un « droit à procréer » ?
Il n’existe pas de droit à procréer, pas plus qu’on ne pourrait exiger un droit à être intelligent, non handicapé… La procréation est une aptitude physiologique que certains ont, d’autres pas, dont on use ou pas. La conception suppose que biologiquement (puis juridiquement) deux personnes interviennent (peu importe comment) et soient à l’origine de l’apparition d’une tierce personne, sujet de droit et non objet de désir. On crée une vie nouvelle, un être à part entière qui ne sera pas « notre » bien, mais une personne humaine, avec une personnalité juridique, autonome. Le droit de chacun doit être mesuré (et limité) à l’aune des droits des tiers, concurrents. Or les demandes actuelles concernant l’accès aux techniques de procréation, portées notamment par la communauté LGBT, se caractérisent par une absence totale de prise en considération de « l’objet de leur désir ». Les enfants n’ont manifestement aucun droit, au contraire des désirs des adultes. Une exigence à avoir un enfant se fait jour, qui entre en conflit, voire écrase les droits de l’enfant.