Questions à… Thierry Martin, président fondateur d’Enerlis

La crise sanitaire aura-t-elle un impact sur la gestion de l’efficacité énergétique ?
Il y a une prise de conscience. Tout le monde voit bien que nous sommes allés un peu trop loin en termes d’environnement. Mais il ne faut pas négliger le facteur financier. Le coût de l’énergie en France est assez bas. Cela n’incite donc pas à faire des efforts. Pourtant, la crise de Covid-19 est une opportunité pour favoriser une relance verte. Un plan d’investissement en faveur des énergies renouvelables et d’une meilleure efficacité énergétique serait une source importante d’emplois. Le nombre de bâtiments énergivores à rénover est considérable.
La crise de Covid-19 est une opportunité pour favoriser une relance verte.
En cela, le programme Action cœur de ville est une opportunité pour la transition énergétique. Ce type d’investissement relève d’un enjeu climatique mais aussi d’un enjeu économique, qui plus est dans le contexte de crise actuel.
Les dernières réglementations vont-elles dans le bon sens ?
Les textes législatifs ou réglementaires énoncent des principes louables. Mais dans les faits, ils sont facilement contournables et de toute façon ils ne sont souvent pas assez contraignants. Un exemple : le propriétaire d’un grand immeuble d’activités tertiaires, à qui notre société a proposé de réaliser une économie de 20 à 25 % sur son budget annuel de dépenses énergétiques qui s’élève à environ 1,5 million d’euros, a préféré ne pas donner suite. Tout simplement parce que le gain lui paraissait marginal, sachant que ce dernier bénéficierait essentiellement à ses locataires. Il ne faut pas oublier que souvent le propriétaire n’est pas l’occupant et l’occupant n’est pas le propriétaire.
Donc, hors législation contraignante, point de salut ?
Le coût énergétique dans le cycle de vie d’un bâtiment n’est que de 3 à 5 %. Autant dire que pour un promoteur ou un bailleur, ce n’est pas une priorité. Certains toutefois savent anticiper. Ainsi, Apsys, propriétaire du centre commercial Beaugrenelle à Paris, a récemment engagé des travaux pour réduire ses dépenses énergétiques. Une opération rentable à terme pour son image mais aussi pour réduire ses charges dans la perspective d’éventuelles vacances commerciales sur son site. Avec la montée du e-commerce et la crise économique post-Covid, c’est plutôt sage. D’autres acteurs de l’immobilier commercial sont également proactifs.