Centres-villes : après l’inexorable déclin, de nouvelles solutions émergent
La redynamisation commerciale des centres-villes tient plus que jamais à une volonté politique forte qui doit nécessairement passer par une démarche globale.
Installation de zones commerciales en périphérie, développement de l’e-commerce, dégradation de l’offre de logements en cœur de ville… de nombreuses causes expliquent la perte d’attractivité des centres-villes. Si le phénomène touche également certaines métropoles, il concerne surtout les petites communes et les villes moyennes où les taux de vacance commerciale sont les plus élevés. Comme le révèle Procos, la fédération pour l’urbanisme et le développement du commerce spécialisé, les communes de moins de 200 000 habitants ont un taux de vacance moyen de 12,2 % (chiffres 2018), contre 11,6 % pour celles entre 200 000 et 500 000 habitants et 8,7 % pour celles de plus de 500 000 habitants. Sur les 54 zones étudiées par Procos qui regroupent entre 200 000 et 500 000 habitants, 17 centres-villes connaissaient une situation critique avec plus de 15 % de vacance commerciale. Certes, certains cœurs de ville comme ceux de Biarritz ou La Rochelle, qui comptent pourtant moins de 100 000 habitants, affichent des taux remarquablement bas de moins de 4 %. Mais leur situation et leur attractivité touristique expliquent de telles exceptions.
Accompagner les commerçants
La situation est devenue dans certaines zones si critique, comme à Béziers, Moulins ou Vierzon qui affichent des taux de vacance supérieurs à 15 %, que l’État, sous la pression de nombreux élus de petites et moyennes villes, s’est décidé à agir. De nombreuses politiques publiques ont ainsi été mises en œuvre ces dernières années pour revitaliser les centres-villes (lire p. 12). Leur mission est d’autant plus essentielle que la pandémie de Covid-19 a sensiblement aggravé la situation. Pour les collectivités, l’enjeu est de taille et peut paraître parfois insoluble tant les contraintes se sont accumulées au fil des années. La surproduction de mètres carrés commerciaux a ainsi abouti à une offre supérieure à la demande.
La valeur ajoutée sera servicielle et expérientielle.
Et ce, alors même qu’explosait l’e-commerce. Parallèlement, les commerçants qui aujourd’hui, pour 70 % d’entre eux, louent leur point de vente ont vu exploser les loyers. « Dans ce contexte, il ne suffit pas de rénover l’offre commerciale mais bien de se réinventer », lâche David Lestoux, fondateur du cabinet LA !, conseil en prospective, revitalisation et stratégie d’urbanisme commercial : « La valeur ajoutée sera servicielle et expérientielle. » Cette transformation radicale, les collectivités se doivent de l’accompagner en proposant aux commerçants, selon David Lestoux, « du coaching, du conseil en design de points de vente et en innovation de services, en référençant par exemple des experts dans ces différents domaines ou en s’appuyant sur des incubateurs de commerçants pour tester des concepts innovants. C’est pourquoi il est impératif de changer le management du centre-ville et le modèle des associations commerciales en créant des offices du commerce à l’image des offices de tourisme ».
Avoir une vision à 360°
Mais au-delà du soutien à l’offre commerciale, l’approche d’une collectivité doit être bien plus globale. « La redynamisation commerciale des centres-villes ne peut réussir que si l’on agit sur toutes les fonctions de commercialité au niveau économique avec la présence d’emplois liés aux commerces et aux activités tertiaires, au niveau de l’offre d’habitat et de services et enfin au niveau de l’identité de la ville avec des aménagements favorisant la convivialité », déclare David Lestoux. Certaines communes qui ont adopté cette vision à 360° ont rencontré un certain succès. La ville de Lamballe dans les Côtes-d’Armor a ainsi réussi à réduire son taux de vacance commerciale de 12 % en 2008 à 4 % avant la crise du Covid-19 en concentrant les équipements dans le centre-ville, en aménageant l’espace public pour plus de convivialité et en accompagnant le relooking des commerces. « Cette transformation des centres-villes est d’autant plus accessible qu’elle peut aujourd’hui bénéficier de la convergence de politiques publiques volontaristes et d’un profond changement sociologique, avec une population de seniors et une génération de moins de 25 ans qui apprécient les avantages des centres-villes (proximité, convivialité…) », estime David Lestoux.
De nombreuses initiatives pendant la crise
Le site www.grande-cause-nationale.fr, mis en ligne par l’association « Centre-ville en mouvement » lors de la crise sanitaire, témoigne de la diversité des initiatives prises par les commerces pour s’adapter (vente à emporter, drive, digitalisation…). Les villes n’ont pas été en reste. Ainsi, La Ciotat a récupéré des conserves vides qui ont été repeintes par des bénévoles et qui ont ensuite été fleuries pour décorer ses rues commerçantes. La ville d’Issoire a proposé « un chèque cadeau acheté, un offert », en partenariat avec l’Office du Commerce, et 20 euros de chèque cadeau aux seniors.