Les mégots de cigarette : un fléau pour la santé… et la qualité de l’eau
Jetés dans les caniveaux, les filtres des mégots de cigarettes aboutissent dans la mer où ils diffusent leurs substances toxiques pendant quinze ans.
On le sait, la cigarette est un fléau pour la santé. Mais son impact sur l’environnement est tout aussi dramatique. En raison des quelque 4 000 substances chimiques qu’il contient, dont une centaine toxiques, voire cancérigènes, un seul mégot peut polluer jusqu’à 500 litres d’eau.
Les mégots qui échouent en mer mettent 15 ans à se dégrader.
Or 4 300 milliards de mégots seraient jetés à terre chaque année (soit 137 000 par seconde) dans le monde, dont 40% échoueraient dans les océans, où les filtres mettraient jusqu’à 15 ans pour se dégrader totalement. Ces filtres, composés d’acétate de cellulose, un plastique conçu par modification chimique de la cellulose au dioxyde de titane et à la triacétine, seraient même la principale source de pollution des océans. Le papier qui entoure le filtre contient lui aussi plusieurs substances chimiques. En France, 56% des fumeurs reconnaissent jeter occasionnellement leurs mégots à terre, depuis leur balcon, aux terrasses de café et dans la rue. En outre, ils font l’erreur de croire que l’impact environnemental sera moindre s’ils le jettent dans le caniveau. Au contraire, il parvient de la sorte d’autant plus rapidement dans l’eau où il diffuse ses agents chimiques : acide cyanhydrique, naphtalène, nicotine, ammoniac, cadmium, arsenic, mercure, plomb. Or les réseaux d’assainissement des eaux ne sont pas équipés pour traiter ces pollutions.
« Ne rien jeter, la mer commence ici »
Dans plusieurs villes dont Paris, Lille, Cannes ou Colmar qui ont opté pour la verbalisation, il en coûte 68 euros par mégot jeté par terre. Dans la capitale, en 2017, les amendes pour ce motif avaient bondi de +723% en un an. À Bordeaux, le premier quartier «zéro mégot» de France, né début 2018 en partenariat avec l’association ÉcoMégot, a vocation à s’étendre à toute la ville, afin de collecter les 200 000 millions de mégots qui y sont jetés chaque année. D’autres communes, comme Douarnenez, ont choisi d’apposer aux abords des grilles d’eau pluviales des messages de sensibilisation : « Ne rien jeter, ne rien vider : la mer commence ici » Le sujet suscite toutes sortes d’innovations, du dressage de corbeaux pour les ramasser au recyclage de l’acétate de cellulose (voir encadré). La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire promulguée le 10 février 2020 prévoit la création d’une filière « pollueur-payeur » qui doit voir le jour dès 2021. Les industriels du tabac devront financer plusieurs missions visant à nettoyer et éliminer cette forme de pollution.
Des cendriers fabriqués à partir de mégots
En partenariat avec des institutions, des entreprises publiques et privées et des municipalités qui l’approvisionnent en mégots collectés, la startup MéGo recycle l’acétate des filtres. Transformant les déchets en matière première secondaire, elle en fait des plaques plastiques à partir desquelles elle fabrique des objets et du mobilier urbains… dont des cendriers.