Les pollutions de l’eau deviennent toujours plus chroniques et diffuses
S’ils n’ont pas totalement disparu, les accidents industriels et leurs conséquences pour la qualité de l’eau se font plus rares, mais les nuisances de l’agriculture intensive persistent tandis que de nouvelles formes de pollutions se développent.
D’Erin Brockowitch à Dark Waters, les pollutions de l’eau d’origine industrielle imprègnent l’imaginaire collectif. Elles n’ont pas disparu, comme en témoigne en avril 2020 la rupture d’une digue de décantation dans une usine sucrière de Cambrai, à l’origine d’une forte mortalité piscicole dans l’Escaut, et dont l’impact pourrait durer 15 ans. Mais selon une étude UFC-Que Choisir de 2019, ce sont celles qui ont le plus régressé au fil du temps. L’état des eaux françaises demeure pourtant préoccupant : en 2017, 53% des eaux de surface et 31% des nappes phréatiques affichent des concentrations en pesticides supérieures aux normes de potabilité. Les progrès sont lents dans les cours d’eau (- 11% de nitrates entre 1998 et 2016), où la valeur guide européenne est dépassée dans 15% des cas. Ils sont quasi nuls dans les nappes phréatiques, dont 43% sont concernées. Nitrates et pesticides sont les premiers responsables des fermetures des points de prélèvement pour l’eau potable. En cause, l’agriculture intensive et l’élevage industriels, et l’échec relatif des plans Ecophyto qui se succèdent depuis 2008. Si ces polluants sont éliminés de l’eau bien avant de parvenir au robinet des particuliers, c’est au prix de traitements coûteux, et de dépassements ponctuels des normes (dont les populations sont dûment informées) dans certaines régions. Mais la présence de ces perturbateurs endocriniens dans les cours d’eau menace dangereusement la faune et la flore aquatiques, et jusqu’à la santé humaine lorsqu’ils se retrouvent dans la chaîne alimentaire.
Microplastiques, effet cocktail, les nouveaux visages de la pollution
Certaines pollutions chroniques, connues de longue date comme les polychlorobiphényles (PCB), interdits depuis 1987 mais qui se dégradent très lentement, ou suscitant un intérêt plus récent tels que les résidus médicamenteux, font l’objet d’un deuxième « plan micropolluants » pour la période 2016-2021. Bien qu’on note aussi une baisse significative des pollutions domestiques au fil du temps, les particuliers jouent un rôle important dans la diffusion de ces nouvelles pollutions.
Un échec relatif des plans Ecophyto depuis 2008.
Les microplastiques issus de la dégradation de déchets (bouteilles d’eau, mégots de cigarettes) abandonnés dans la nature, ou de fibres textiles artificielles rejetées par les lessives, sont des vecteurs de pollution particulièrement dangereux. Non contents de représenter en eux-mêmes une nuisance pour la faune aquatique – et potentiellement pour l’alimentation et la santé humaine –, ils absorbent d’autres substances qu’ils transportent jusqu’à la mer, polluant ainsi les écosystèmes qu’ils traversent. Et sont soupçonnés d’interagir entre eux pour produire un « effet cocktail » encore mal cerné.
Covid dans l’eau non potable : aucun risque sanitaire
La mairie de Paris a suspendu l’utilisation de son réseau d’eau non potable dès l’apparition de traces infimes du coronavirus. Alimenté par la Seine et utilisé pour nettoyer les rues et arroser les jardins, ce réseau est totalement distinct du réseau d’eau potable, alimenté par les captages ou les stations d’épuration en eau parfaitement propre à la consommation.
En revanche, l’eau contaminée par les urines peut infecter les boues des stations d’épuration. L’Anses a donc suspendu l’épandage des boues non hygiénisées durant l’épisode épidémique.