Les eaux usées : une mine encore ignorée
Recycler les eaux usées pour les espaces verts et l’agriculture, voire pour l’eau potable, est une piste essentielle à exploiter, sur laquelle la France accuse un retard important.
Disponible en grande quantité, et de plus en plus avec le développement économique, utilisable localement, moins chère à traiter que l’eau de mer…les atouts de l’eau usée sont nombreux, et les appels à la recycler pour la ré-utiliser se multiplient. En 2017, l’ONU consacrait une étude à ce sujet, et qualifiait cette ré-utilisation des eaux usées de « ressource inexploitée ». Mettant en évidence les avantages sociaux, environnementaux et économiques que recèlent les eaux usées, le rapport rappelait qu’aujourd’hui, plus de 80% sont rejetées dans l’environnement sans traitement.
En France, les rues sont le plus souvent lavées à l’eau potable !
L’Union européenne, de son côté, propose une harmonisation des législations nationales et vise un taux de 5%. Le « re-use », qui consiste à traiter et recycler les eaux usées pour arroser les espaces verts, les cultures, voire les transformer en eau potable comme à Singapour, est déjà adopté par de nombreux pays. A commencer par des îles contraintes de gérer la ressource au plus juste. Outre Singapour, Chypre et Malte recyclent 60% de leurs eaux usées. La Jordanie, la Namibie ou le Maroc en sont également adeptes, le champion toutes catégories étant Israël, qui irrigue ainsi la moitié de ses cultures (contre 10% seulement dans le monde).
Réticence culturelle et réglementation trop contraignante en France
Dans ce contexte, la France figure parmi les plus mauvais élèves. Certaines régions (dont les îles de Noirmoutier et Porquerolles) ont fait ce choix pour leur irrigation pour des raisons économiques, mais à l’échelle nationale, le taux de recyclage est inférieur à 0,5% et les rues sont le plus souvent lavées à l’eau potable ! En cause : une réticence d’ordre culturel et une réglementation encore trop stricte. Une nouvelle réglementation de 2014 autorise l’irrigation d’espaces verts et de parcelles agricoles, mais reste très contraignante et donc coûteuse. Résultat : les expérimentations se comptent encore sur les doigts d’une main. Outre l’arrosage de terrains de golf, on commence cependant à voir apparaître de rares exemples d’alimentation de réservoirs d’eau potable ou de nappes phréatiques.
Sondage utilisation d’eaux usées recyclées en France
86% des gens accepteraient d’utiliser une eau du robinet issue du recyclage pour un usage domestique.
75% des gens seraient disposés à consommer des légumes arrosés avec des eaux usées dépolluées.
53% des sondés boiraient une eau du robinet issue du recyclage des eaux usées.
73% des Français pensent que l’eau est une ressource limitée, contre 54% en 2000.
41% pensent qu’ils ne manqueront jamais d’eau dans leur région contre 66% en 2000.
Source : 22e baromètre Les Français et l’eau, TNS-Sofres/Centre d’information sur l’eau, 2018