Comment la pollution de l’eau contamine aussi l’économie
Certains chiffres sont connus de longue date. En 2017, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estimait que 2,1 milliards de personnes – 30% de la population mondiale – n’avaient pas accès à l’eau potable et 60% ne disposaient d’aucun service d’assainissement fiable. Mais l’impact de la pollution de l’eau sur la croissance économique restait mal connu.
Une mauvaise qualité de l’eau peut amputer le PIB d’un tiers.
Un rapport choc de la Banque mondiale intitulé « Quality unknown : the invisible water crisis », publié en août 2019, l’a révélé au grand jour. Fondé sur l’exploitation de la plus grande banque de données au monde sur la qualité de l’eau, construite à partir de relevés sur le terrain, dans des stations de contrôle et de données satellitaires, il livre des conclusions sans appel : la détérioration de la qualité de l’eau entrave la croissance économique, aggrave les problèmes sanitaires, réduit la production de denrées alimentaires et exacerbe la pauvreté dans de nombreux pays. Jusqu’à raboter d’un tiers le PIB potentiel de certaines régions. En cause, les répercussions sur la santé humaine et les écosystèmes des bactéries, eaux usées, produits chimiques et plastiques qui, en pompant l’oxygène dissoute dans l’eau, la transforment en poison.
Engrais, microplastiques et produits pharmaceutiques pointés du doigt
L’azote présent dans les engrais, qui se transforme en nitrates dans les lacs, rivières et océans où il finit sa course, est l’un des principaux accusés. Selon la Banque mondiale, son impact négatif sur la santé serait supérieur à celui de l’amélioration des rendements agricoles. La salinité de l’eau et des sols, autre pollution liée aux perturbations générées par le changement climatique, fait par ailleurs baisser ces rendements et génère une sous-production correspondant aux besoins en alimentation de 170 millions de personnes. Micro-plastiques, produits pharmaceutiques et métaux lourds complètent le tableau et frappent aussi bien les pays riches que ceux en développement. Pour David Malpass, président du Groupe de la Banque mondiale, « Les pouvoirs publics doivent prendre d’urgence des mesures pour lutter contre la pollution de l’eau de sorte que les pays puissent croître plus rapidement de manière équitable et durable sur le plan environnemental ». Le rapport préconise notamment de travailler sur les normes relatives à la qualité de l’eau, les infrastructures de traitement et la communication à destination des ménages afin de les sensibiliser et de les impliquer dans cette bataille.
L’eau au cœur des ODD
Parmi les 17 objectifs de développement durable (ODD) définis par les Nations unies pour 2030, l’ODD 6 vise à « garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau » :
• Améliorer la qualité de l’eau en réduisant la pollution, en éliminant l’immersion de déchets et en réduisant les émissions de produits chimiques et de matières dangereuses, en diminuant de moitié la proportion d’eaux usées non traitées et en augmentant le recyclage et la réutilisation sans danger de l’eau
• Protéger et restaurer les écosystèmes liés à l’eau (montagnes, forêts, zones humides, rivières, aquifères, lacs)
• La pollution de l’eau apparaît aussi dans l’ODD 3 (santé), et dans l’ODD 12 (consommation et production responsables).