Inde • A Bangalore, gloire et misère numériques
On la compare souvent à la Silicon Valley. Troisième mégapole du sous-continent indien après Mumbai et Delhi, Bangalore est un des plus grands hubs de startup au monde. Une situation largement encouragée par les pouvoirs publics du pays, qui ont massivement investi dans l’économie et l’entrepreneuriat numériques.
Cyber-prolétariat de travailleurs indépendants.
Mais si la capitale de l’État du Karnataka a su tirer profit de la révolution digitale, c’est grâce à un cocktail savamment dosé : vivier massif de développeurs, maillage substantiel de fonds de capital-risque et culture de l’innovation. Forte de cette alchimie, Bangalore voit fleurir sur son territoire des sociétés dont les produits et les offres rayonnent sur le pays et au-delà. Les fleurons internationaux du numérique (Facebook, Amazon, Uber) y sont chatouillés par des compétiteurs locaux (Helpchat, Flopkart, Ola).
Des ingénieurs cinq fois moins bien payés qu’en Califorrnie
Mais cette euphorie technologique, alimentée par un épais tissu d’écoles d’ingénieurs, a vite rencontré des limites sociales. Si la main d’oeuvre est exceptionnellement disponible, elle est aussi notoirement bon marché. Un rapport publié par Compass en 2015 évaluait le salaire moyen des employés tech dans les startups de Bangalore à 25 000 dollars (22 000 euros) annuels, soit cinq fois moins que dans la Silicon Valley et deux fois moins qu’à Paris. Depuis quelques années, ce moins-disant salarial se double d’un véritable prolétariat numérique. L’émergence des technologies dites d’intelligence artificielle est en train de nourrir, à Bangalore notamment, un cyber-prolétariat de travailleurs indépendants, sans couverture sociale, sous-payés pour effectuer des tâches répétitives. En Inde comme ailleurs, le développement effréné du numérique génère ses exclus.