Europe : Une justice des mineurs en rupture avec le modèle tutélaire
Au-delà des diversités d’appréciation sur l’âge de responsabilité pénale des mineurs, les pays européens tendent pour la plupart vers une justice plus punitive que la France.
En Europe, l’âge de la responsabilité pénale, âge où le mineur peut être considéré responsable de ses actes et donc passible de sanctions pénales, varie en fonction des pays. Il est fixé par la loi à 8 ans en Écosse et en Grèce, 10 ans en Angleterre et en Suisse, 12 ans aux Pays-Bas, au Portugal et en Belgique, 14 ans en Espagne, Allemagne et Italie, 15 ans en Suède et 18 ans au Luxembourg. En Europe, la notion de majorité pénale à partir de laquelle un délinquant ne comparaît plus devant une juridiction spécialisée pour les mineurs et ne bénéficie plus d’une présomption d’atténuation de responsabilité est donc à géométrie variable.
Une majorité pénale à géométrie variable
Dans les faits, cette responsabilité répond toutefois à une interprétation évolutive selon la situation du jeune. Ainsi, au Luxembourg, selon la gravité et l’échec de précédentes mesures éducatives, le juge peut renvoyer devant le tribunal correctionnel un mineur entre 16 et 18 ans.
La tendance est d’équilibrer le binôme éducation-punition.
Il doit tenir compte de la personnalité du mineur (enquête sociale, expertise psychologique, passé judiciaire), mais dans les faits la gravité de l’infraction est également prise en compte et la récidive est un élément de preuve de l’échec des mesures éducatives préalables. Inversement, en Allemagne et en Italie par exemple, la responsabilité pénale d’un mineur entre 14 et 18 ans peut être écartée en raison de son « immaturité ». En Italie, en Allemagne, aux Pays-Bas ou encore en Espagne, le juge peut également appliquer le droit des mineurs à des jeunes entre 18 et 21 ans. Inversement, en Belgique ou en Grande-Bretagne notamment, la présomption d’irresponsabilité d’un mineur de 16 à 18 ans peut être écartée pour des faits jugés graves ou particulièrement sérieux.
Le retour de la privation de liberté
Cette diversité du droit pénal appliqué aux mineurs ne doit pas faire oublier qu’en Europe, les législations nationales ont privilégié au cours du 20ème siècle une justice des mineurs plus protectrice que répressive. Mais ce modèle tutélaire a été remis en cause ces dernières années. Depuis le début des années 2000 et dans un contexte de dramatisation des discours politiques autour de la délinquance des jeunes, les systèmes de justice pénale des mineurs ont été confrontés en Europe, comme ailleurs dans le monde occidental, à de profondes transformations.
Le Canada a connu une réforme importante de sa législation en 2003, la Turquie et la Roumanie en 2005, la Belgique ainsi que l’Espagne en 2006. La tendance de ces adaptations législatives est clairement aujourd’hui d’équilibrer le binôme éducation-punition en mettant l’accent sur la responsabilisation des jeunes, l’apprentissage des normes et des valeurs sociales et sur le rôle revalorisé de la privation de liberté.