Une réserve de mesures pour lutter contre les pénuries
Le rapport d’information du sénateur Jean-Pierre Decool, remis en 2018, a inspiré plusieurs mesures récentes. Il contient d’autres propositions d’action.
Les préconisations du sénateur indépendant du Nord Jean-Pierre Decool ont été entendues. Une partie des 30 mesures recommandées par le rapport d’information fait au nom de la mission d’information sur la pénurie de médicaments et de vaccins qu’il a remis en septembre 2018 vont entrer en vigueur. Ainsi, la proposition n°13, visant à « rendre publics les plans de gestion des pénuries (PGP) mis en oeuvre par les industriels, ainsi que les sanctions adressées en cas de manquements dans la notification et la mise en oeuvre de ces plans », constitue une mesure phare du PLFSS 2020. De même, la proposition de mettre en place « une plateforme d’information centralisée sur les situations de ruptures et de risques de rupture, renseignée par l’ANSM, les laboratoires, les dépositaires, les grossistes-répartiteurs, les pharmaciens d’officine et les pharmaciens d’hôpital » est en train d’être traduite dans les faits. Cependant, plusieurs pistes d’amélioration de la gestion des pénuries de médicaments restent à explorer.
Investir dans des moyens de production publics
La proposition n°8 consiste ainsi à « instituer un programme public de production et distribution de quelques médicaments essentiels concernés par des arrêts de commercialisation, ou de médicaments » de niche » régulièrement exposés à des tensions d’approvisionnement, confié à la pharmacie centrale des armées et à l’agence générale des équipements et produits de santé ». « Le Sénat n’est pas coutumier des appels à la dépense publique », a rappelé Jean-Paul Decool lors de la présentation de son rapport à la presse, mais il estime que les conditions de marché l’exigent, car « les contraintes financières ont pris le pas sur l’éthique dans l’industrie pharmaceutique ». Le sénateur défend par ailleurs la possibilité d’augmenter le prix des médicaments anciens dont l’efficacité thérapeutique est importante, car les prix de tels médicaments peuvent être 8 fois inférieurs en France par rapport à d’autres marchés, tels que les Etats-Unis.
Agir au niveau européen
Le rapport encourage surtout la mise en œuvre d’une action concertée au niveau européen, à commencer par l’élaboration d’une définition commune de la notion de rupture d’approvisionnement, accompagnée d’une grille standard d’évaluation du risque associé à une situation de tension ou de rupture. En effet, seuls trois pays de l’Union européenne ont défini légalement la notion de rupture : la France, la Roumanie et la Slovénie.
Ouvrir la possibilité d’augmenter le prix des médicaments anciens.
Cette mesure pourrait s’accompagner de la définition d’une liste de médicaments – ou molécules – essentiels pour la sécurité sanitaire européenne. Grâce à ces dispositions, un nouveau critère pourrait être ajouté au référentiel des inspections de l’ANSM et de l’EMA : celui de l’évaluation de la soutenabilité des capacités de production et de leur adéquation à la demande projetée. En outre, les notices des médicaments exposés à des tensions d’approvisionnement pourraient être harmonisées et dématérialisées dans toutes les langues de l’Union européenne. L’Agence européenne des médicaments (EMA) pourrait alors construire et piloter une base de données européenne des situations de tension ou de rupture de tous les médicaments commercialisés sur le marché européen. Les Etats membres pourraient enfin activer l’achat groupé de vaccins essentiels et instituer une réserve de sécurité de médicaments essentiels à la sécurité sanitaire.