Données ouvertes : vers une meilleure assurance santé ?
Les assureurs pourront prendre en charge des risques actuellement non couverts et mieux cibler les actions de prévention. Les tarifs pourraient baisser.
2020 sera l’année de la révolution française de l’Open Data en santé, donnant le coup d’envoi à l’ouverture progressive de l’ensemble des bases de données publiques. L’Hexagone rejoint ainsi les pays pionniers de l’ouverture des données de santé anonymisées, tels que les Etats-Unis, le Canada ou encore le Danemark. Outre l’enjeu de transparence vis-à-vis des citoyens, qui pourront librement consulter et utiliser ces données, cette réforme intéresse les assureurs. Jusqu’à présent, l’accès aux quelque 260 bases de données publiques en santé leur était restreint.
La loi Evin interdit la tarification basée sur des données de santé.
Or, ces bases constituent une mine d’informations sur l’état de santé de la population et son évolution : à lui seule, le Système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie (SNIIRAM) contient la consommation de soins des Français depuis 1999. Pour les organismes d’assurance maladie complémentaire, l’accès à ces données anonymisées va par exemple permettre d’observer statistiquement l’évolution des différentes pathologies dans le temps et au niveau géographique, ou encore par classes d’âge, et de pouvoir en extrapoler une tendance d’évolution future. De ce fait, les actuaires pourront mieux cerner les risques liés à chaque pathologie et donc mieux maîtriser le coût des engagements qu’ils prennent. Il devrait en résulter un ajustement à la baisse des tarifs des contrats d’assurance complémentaire santé. Autre bénéfice collectif, cette meilleure connaissance de l’évolution de la santé des Français devrait faire apparaître une offre de couverture pour des risques qui ne sont pas encore couverts, faute de données disponibles pour permettre aux assureurs d’évaluer le risque pris. Par exemple, seuls quelques contrats très chers prévoient actuellement une couverture de la perte d’autonomie partielle au grand âge, car ce risque – qui va augmenter au cours de la prochaine décennie du fait du vieillissement de la population – est difficile à évaluer. Mais en accédant aux données publiques sur le nombre de personnes concernées, la longévité des bénéficiaires et sur l’évolution de leurs soins au fil des années, les assureurs vont pouvoir proposer les garanties les plus adaptées et à un tarif concurrentiel. Enfin, cette connaissance nouvelle va également permettre de mieux cibler leurs actions de prévention.
Eviter la réidentification et le risque de discrimination
Les ajustements tarifaires attendus seront applicables collectivement, car la loi Evin interdit la tarification basée sur des données de santé. La définition de ce concept a été élargie par le Réglement européen sur la protection des données personnelles (RGPD), entré en vigueur en mai 2018, à « toute information relative à la santé physique ou mentale, passée, présente ou future, d’une personne physique », qu’il s’agisse de données de santé par nature, de celles qui le deviennent en raison de leur croisement avec d’autres données ou de celles qui le deviennent en raison de leur utilisation à caractère médical. Les bases de données publiques anonymisées qui seront ouvertes ont ainsi été scrutées sous le contrôle de la CNIL pour garantir que les éléments mis à disposition du public ne puissent pas permettre la réidentification d’une personne lorsqu’ils sont croisés avec d’autres bases. Et éviter tout risque de discrimination lié à la fuite de données de santé.