La concentration des fonds européens : un risque pour les collectivités
Pouvez-vous préciser pourquoi les fonds européens sont essentiels pour financer les investissements locaux ?
Entre deux tiers et trois quarts du budget européen total revient aux territoires. Ce dernier se décline en deux grandes politiques, la PAC (politique agricole commune), dont près de 20% des projets soutenus concerne le développement rural et donc les collectivités, et surtout, la politique de cohésion déclinée en plusieurs fonds : le fonds européen de développement régional (Feder), le fonds social européen, le fonds européen agricole pour le développement rural et le fonds européen pour les affaires maritime et la pêche. Ces quatre enveloppes, réunies sous l’intitulé FESI (fonds européens structurels et d’investissement), ont pour particularité d’être gérées par les régions. Sur la période 2014-2020, la France a bénéficié d’un montant total de 28 Mds €. La part affectée aux collectivités dépend des projets déposés et financés, mais on peut dire que l‘essentiel du FESI est à destination des collectivités.
Quels sont les enjeux de la négociation en cours sur les fonds européens entre les pays membres et la Commission européenne ?
La Commission européenne a présenté son projet qui prévoit une forte concentration des fonds : pour la période qui vient de s’écouler, les fonds se partageaient en sept objectifs. Pour la prochaine génération, seulement cinq objectifs et une grande part des fonds fléchés sur le seul objectif de recherche et d’innovation.
85% des ressources du Feder sont fléchées sur l’innovation et la recherche.
Les collectivités ne seront pas les premières concernées. Nous militions pour donner une place plus importante à l’objectif « Lutte contre les changements climatiques », les collectivités ayant de nombreux investissements à faire dans ce domaine.
Suite à un rapport sénatorial, le sujet de l’insuffisante consommation des fonds européens revient au premier plan. Qu’en est-il ?
La France est très largement dans la moyenne de consommation, voire dans la moyenne supérieure par rapport aux autres pays membres. Les retards sont essentiellement dus à la fusion des régions qui a imposé une programmation tardive. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’est pas nécessaire de simplifier les procédures. L’instruction des fonds européens impose de vérifier un certain nombre des choses : le respect du droit européen des marchés intérieurs et du droit européen de la concurrence. Chaque dossier instruit étant obligatoirement cofinancé, l’instruction se porte sur l’ensemble du dossier. Les collectivités, et surtout les plus petites d’entre-elles, ne sont pas outillées en ingénierie pour postuler à ces financements. Même si les régions apportent un accompagnement, leur principale mission demeure l’animation et l’instruction des fonds.
Concernant le sujet de la contractualisation, l’Etat et les collectivités achoppent sur le traitement des fonds européens. Le problème est-il résolu ?
Le problème n’est pas résolu. Les collectivités sont fortement incitées à faire appel aux ressources européennes, mais tous les financements obtenus génèrent nécessairement des dépenses de fonctionnement. Les régions ont obtenu gain de cause en tant qu’autorité de gestion des fonds européens. Un certain nombre de collectivités ne répondront plus aux appels à projets européens pour éviter de dépasser les plafonds de dépenses de fonctionnement.
* Association française du Conseil des Communes et Régions d’Europe