Services publics : de nouveaux arbitrages vont s’imposer
Après avoir lancé les chantiers d’optimisation, les collectivités devraient prendre des mesures réduisant les offres de services aux habitants. Choix difficiles en perspective.
Au-delà de l’amplitude horaire, de la réorganisation des services, du nombre de salariés qui y sont affectés, des missions qui leur sont confiées, la question se pose : jusqu’où les collectivités doivent-elles rendre des services à la population ? Le sujet n’est pas facile à aborder, d’autant plus en période préélectorale. Pourtant, la baisse des dotations, la limitation de dépenses de fonctionnement sont dans l’esprit de tous les élus et gestionnaires locaux. « Face aux contraintes financières, toutes les collectivités se sont engagées dans la réduction de l’offre de service », estime Emmanuel Decamps, directeur financier de la ville du Havre et intervenant formateur à l’Afigese*. Mais le sujet reste tabou et il est plus aisé de parler d’optimisation des services publics. « Au Havre, le choix s’est porté sur la masse salariale ou comment faire autant, voire plus, tout en maîtrisant les effectifs. » Les études lancées par la ville illustrent ses intentions : une étude de coûts sur la mise à disposition des matériels aux associations s’accompagne d’une réflexion sur la tarification. Une autre étude sur l’état civil déclinant notamment l’activité, les horaires d’ouvertures, les prestations. « Les collectivités, même celles de taille moyenne, se saisissent du sujet qui reste en général à l’état de projet. Pour les collectivités les plus avancées, il s’agit de s’attaquer au dur. »
Pour Stéphane Gorce, membre associé du cabinet Eurogroup consulting, conseil auprès des collectivités, cette dimension, qui place le service public comme variable d’ajustement pour réduire les charges financières, est une réalité qui s’est accentuée ces dernières années.
Il faut trouver des raisons acceptables voire séduisantes pour les habitants.
« Avant même de réduire les services, les élus font en sorte de ne pas élargir les interventions des collectivités, car ils sont conscients qu’ils sont de moins en moins maîtres de leurs recettes, un sentiment amplifié par la réforme fiscale en cours », tempère-t-il.
Depuis des années, les directions des espaces verts ont montré le chemin, avec notamment la gestion différenciée, une méthode permettant de classer les différents espaces verts et d’adapter en fonction le niveau des interventions des équipes, le choix des plantations… En limitant l’entretien et les traitements phytosanitaires, la gestion différenciée favorise le développement de la diversité de la faune et de la flore. Ces avancées sont d’autant plus aisées qu’elles couplent la nécessité d’une bonne gestion à des objectifs environnementaux, voire participatifs (avec les jardins pour les habitants). « Les végétaux sont moins chers, nous favorisons le co-pâturage mais les parcs restent beaux et notre intervention correspond à la demande de la population », résume Emmanuel Decamps.
Dans une même optique d’optimisation, les collectivités s’attachent, depuis quelques temps, à mettre à plat le soutien qu’elles apportent aux associations. Au-delà des subventions, sont quantifiés les avantages liés à l’absence de loyers, le coût des consommations d’énergie ou d’entretien… « Si notre choix n’est pas de baisser les subventions, en contrepartie, nous demandons aux associations d’être plus présents sur les projets municipaux », conclut le directeur financier de la ville du Havre.
* Association Finances-Gestion-Évaluation des Collectivités Territoriales