Fiscalité locale : les nouveaux termes d’une relative autonomie
Avec la réforme de la taxe d’habitation, les recettes fiscales vont évoluer. Représentant 50% des recettes des collectivités, elles sont, de tout temps, au cœur des enjeux des finances locales.
Même si la suppression progressive de la taxe d’habitation (TH) doit être compensée dans les budgets locaux, les élus ne sont pas satisfaits. En juin dernier, le gouvernement révélait les grandes lignes de sa réforme fiscale. Première annonce, le foncier bâti sera transféré des départements aux communes pour compenser la suppression de la TH. Les débats engagés depuis l’annonce de la réforme se sont poursuivis durant l’examen du projet de loi de finances 2020 jusqu’à son adoption en décembre».
Les recettes avec pouvoir de taux représentent 65% des recettes fiscales.
Les élus réitèrent avec force, comme à chaque réforme fiscale, leur attachement à leur pouvoir fiscal. L’Association des maires de France (AMF) a réaffirmé en juillet sa position : « il faut respecter intégralement l’autonomie financière et fiscale tout en maintenant le lien fiscal entre les collectivités territoriales et les citoyens ». Du côté des départements, la perte du foncier bâti fait aussi grincer les dents car la compensation consisterait en un prélèvement de TVA (comme pour les intercommunalités). Une mesure qui acte la fin de toute possibilité, pour les départements, de fixer le taux des impôts.
Une autonomie encadrée
Dans les faits, le pouvoir fiscal des collectivités est fortement encadré : les élus gardent la possibilité de faire évoluer le taux des impôts et de définir des abattements ou des exonérations. Les bases sont fixées par les services fiscaux. A la fiscalité directe, qui se décline en plus de dix taxes différentes (fiscalité économique, des ménages ou spécifiques) s’ajoute une fiscalité indirecte elle aussi déclinée en une dizaine d’impôts dont certains, comme les droits de mutation, sont essentiels pour les collectivités. Pour le plus grand nombre de ces impôts, les collectivités ont des outils permettant d’influer sur la fiscalité : majorations, dégrèvements, exonérations, fourchettes d’évolution des taux…
Fiscalité : deux-tiers des recettes de fonctionnement
Quand on parle de levier sur les impôts, on s‘attache plus précisément aux taux des taxes directes qui représentent la part la plus prégnante des ressources (TH, taxe sur le foncier bâti et cotisation foncière des entreprises). Au-delà de leur impact politique – l’augmentation des taux provoque des tensions dans la population, – ce pouvoir fiscal permet aux collectivités de projeter leurs dépenses, de définir leurs investissements… Donc de caler leur développement sur leurs ressources. Depuis 2011, cette liberté ne concerne que le bloc communal et les départements. Dans une étude, « Regards sur la fiscalité locale 1986-2018 », publiée en juin 2019, la Banque postale constate qu’en trente ans, la part des recettes fiscales avec pouvoir de taux est passée de 90% à 65% des recettes fiscales totales. Ce constat ne fait l’objet d’aucun débat : les collectivités ont perdu une partie de leur pouvoir fiscal. Pour autant, rappelle l’étude, les ressources fiscales ont fortement augmenté. En 1986, elles s’élevaient à 32 Mds € et représentaient 57% des recettes de fonctionnement des collectivités et 53% de leurs recettes totales hors emprunts. En 2018, elles sont près de cinq fois supérieures (elles ont un peu plus que doublé en euros constants par habitant) et représentent désormais, avec 150 Mds €, les deux tiers des recettes de fonctionnement et 63% des recettes globales des collectivités.