La réinsertion, ça s’apprend
Depuis 2010, l’association nantaise Permis de construire accompagne la réinsertion des personnes placées sous main de justice.
La formation contre la récidive. Ce pourrait être la profession de foi de Permis de construire, association nantaise agissant depuis 2010 pour la réinsertion des personnes “placées ou passées sous main de justice”. Créée par un entrepreneur engagé, Cyril Maury, Permis de construire accueille chaque année une centaine de personnes âgées de 18 à 60 ans, qui soit sont incarcérées, soit purgent une peine alternative à la prison, bénéficient d’un aménagement de peine ou bien ont récemment été libérées. Objectif : les accompagner dans leur parcours de sortie de peine pour prévenir la récidive.
En France en 2017, la récidive concernait 40,8% des personnes condamnées pour délit. Un score élevé – deux fois supérieur à celui des pays nordiques – que les experts du fait judiciaire expliquent en partie par le poids des peines d’emprisonnement dans le système de sanction. La privation de liberté et le choc carcéral constituent en effet des facteurs de déstructuration qui compromettent fortement la réhabilitation. A fortiori quand près de la moitié des personnes détenues n’a aucun diplôme.
« Le temps carcéral gagne largement en efficience dès lors qu’il peut s’inscrire dans une logique de préparation à une future intégration professionnelle », explique Ludovic Dardenne, directeur de l’association. Parce qu’elle offre au détenu ou à l’ex-détenu une triple promesse de valorisation, d’occupation et de réappropriation mentale de l’idée même d’emploi, la formation apparaît comme le plus sûr levier de prévention de la récidive.
25% de sortie en emploi
La plupart des personnes sont orientées vers l’association sur recommandation du Service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) de Nantes. « L’entrée dans le processus d’accompagnement est soumis à trois prérequis : l’envie, la capacité d’engagement, la perception de l’utilité de la démarche », précise Ludovic Dardenne. Une fois ces préalables satisfaits, pas de condition imposée quant à la durée du parcours : certains parviendront à amorcer leur projet professionnel ou personnel au bout de trois mois, d’autres auront besoin de trois ans. 61% des personnes suivies sortent du parcours avec un projet valide. En 2018, 17 personnes sur 90 ont quitté l’association en emploi. Permis de construire affiche un taux de récidive inférieur à 5%.
Pour parvenir à ce résultat, l’association a développé un séquençage méthodologique, adossé à un calendrier fourni d’ateliers pratiques autour de thématiques professionnelles, culturelles, sociales. L’association passe un contrat d’objectif avec les personnes accompagnées. A chacune d’elles ensuite de se faire l’architecte de sa propre orientation, de choisir les outils pour mener à bien son projet. Chez Permis de construire, les personnes accompagnées sont d’ailleurs appelées “pilotes”. Pour les épauler, l’association s’appuie sur un réseau de professionnels, consultants, managers, chefs d’entreprise, qui viennent partager leur expérience. « Nous avons tissé des liens avec des réseaux comme Dirigeants responsables de l’Ouest, Entrepreneurs et dirigeants chrétiens, ou le Centre des jeunes dirigeants de Loire-Atlantique », précise Ludovic Dardenne. En 2020, l’association vise un nouveau cap : essaimer son modèle sur d’autres territoires.