Intercaler apprentissage et activités complémentaires
Que pensez-vous des réformes successives modifiant la durée de la semaine d’école ?
En préambule, il faut constater que l’organisation de l’emploi du temps ne prend pas suffisamment en compte l’intérêt des enfants, au bénéfice de considérations économiques : les vacances de février ont été créées après les Jeux olympiques de Grenoble pour rentabiliser les stations de ski… Or, si l’on ne s’occupait que de leur intérêt, il faudrait s’attacher principalement à leurs rythmes journaliers, qui ont été démontrés par des travaux scientifiques de chronobiologie et de chronopsychologie. La chronobiologie a mis en évidence des rythmes physiologiques incontestables au cours de la journée. Ainsi, il a été demontré qu’en fin de matinée, les enfants de primaire sont plus résistants et capables de fournir davantage d’efforts.
La semaine de quatre jours est injuste et source d’inégalités.
Les travaux de chronopsychologie, que j’ai impulsés, donnent des résultats similaires. À l’aide de tests de comportement très simples, mesurant l’attention et la vigilance, ils ont montré que généralement, le niveau des performances intellectuelles des enfants est plus élevé du début à la fin de matinée, avec un creux à l’heure du déjeuner. En revanche, les petits de maternelle ont des rythmes différents, en dents de scie au cours de la journée, et il convient de ne pas aménager leur temps d’école de la même façon que pour les plus grands.
Comment faut-il organiser le temps scolaire et périscolaire ?
La priorité dans l’aménagement du temps des jeunes, c’est justement de prendre en compte la journée et ses rythmes. À l’école élémentaire, les journées de classe sont aujourd’hui beaucoup trop longues, et c’est encore plus long pour les enfants de milieux en difficulté. Il faudrait « dédensifier » aussi bien les activités scolaires que périscolaires, avec des pauses, comme il y en a en maternelle, pour tenir compte de ces rythmes : que l’enfant puisse être parfois à l’écoute et vigilant, en situation d’apprentissage et, à d’autres moments, qu’il « se repose » en utilisant les informations qu’il a acquises. Il conviendrait de réduire un peu la journée scolaire et d’intercaler disciplines scolaires et activités complémentaires. Chercheurs, parents, enseignants, éducateurs sont responsables de cette complémentarité éducative qui évite que les enfants soient abandonnés à eux-mêmes.
Semaine de quatre jours ou de quatre jours et demi : laquelle a votre faveur ?
Il est déjà difficile de boucler les programmes avec quatre jours et demi, mais avec quatre jours, c’est le surbooking ! Il y a des enfants qui résistent, que cela ne gêne pas et qui sont en mesure d’être stimulés en permanence par leurs parents, mais pour d’autres, c’est injuste et source d’inégalités. Les évaluations de terrain que j’ai menées – une trentaine – montrent toutes, scientifiquement, qu’en zone d’éducation prioritaire, par exemple, les enfants de milieux défavorisés ont une rythmicité journalière désynchronisée quand il n’y a pas d’école le samedi matin, ce qui est source de fatigue. Sans compter qu’ils dorment moins et sont désœuvrés, car la commune n’a souvent pas les moyens de leur proposer des activités. Leurs rythmes s’inversent, avec des performances d’attention-vigilance beaucoup plus faibles le lundi et parfois jusqu’au mardi midi. Or, ils ont besoin d’un emploi du temps qui respecte leur rythmicité ; même quatre jours et demi sans aucune proposition périscolaire, pour ces jeunes, c’est préférable aux quatre jours.
* Observatoire des rythmes et des temps de vie des enfants et des jeunes