Le plan Logement d’abord peine à démarrer
Lancé en 2018, le plan quinquennal du gouvernement, Le logement d’abord, a pour objectif de favoriser l’accès à un logement sans passer au préalable par un centre d’hébergement d’urgence. Il prévoit de porter les logements très sociaux à 40 000 par an, d’ouvrir 10 000 places en pensions de famille sur cinq ans et dans le même temps créer 40 000 places supplémentaires dans le parc locatif privé. Bien que ce plan fasse l’unanimité auprès de l’ensemble des acteurs du logement social, il peine à démarrer. Selon la Fondation Abbé Pierre, la lenteur de sa mise en œuvre s’explique par un portage politique local souvent trop faible. « De nombreux plans sont perturbés par une implication très inégale des partenaires qui doivent agir de concert. » Comme dans le département de la Seine-Saint-Denis qui s’est lancé seul dans le Logement d’abord, sans la Métropole du Grand Paris, ni les établissements publics territoriaux. Ce que déplore Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis : « Le succès du plan Logement d’abord dans les territoires nécessite un engagement de toutes les parties prenantes, et une cohérence de l’action de l’Etat en matière de logement qui manquent cruellement aujourd’hui ».
Une production de PLAI en berne
Pourtant, « la production accélérée des logements sociaux et très sociaux est un prérequis du Logement d’abord », annonce Florent Gueguen, directeur de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS). Et si l’État a réalisé des efforts, le compte n’y est pas. En décembre 2018, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) réaffirmait cette urgence. Fin juin, il tirait la sonnette d’alarme : les 40 000 prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI) du plan Logement d’abord ne suffiront pas, il en faudrait au moins 60 000. Une gageure face à la réduction de loyer de solidarité (RLS) qui a aspiré les ressources des bailleurs sociaux. Un autre levier doit être actionné : celui des politiques d’attribution, « qui de fait, n’ont pas de fluidité en zones tendues, soulève Jean-Yves Mano, président de la CLCV (Consommation, logement et cadre de vie).
Ce plan a besoin de financement plus massif et non de ressources précaires.
Dans un contexte de pénurie de logements sociaux et avec le plan quinquennal, les sans-abri deviennent prioritaires, devant d’autres publics déjà prioritaires, et au détriment des couches moyennes ». Les mécanismes de priorisation – publics Dalo, loi égalité citoyenneté qui impose que 25% des relogements aillent au premier quartile des revenus des ménages – doivent désormais se concentrer aussi sur les personnes accompagnées pour sortir de la rue, ou installées dans des structures d’hébergement. L’Etat s’y est engagé avec des attributions en hausse de 30%. Mais aucune pression n’est exercée sur les attributaires du logement social.
L’accompagnement social : un enjeu clé
Le Logement d’abord a besoin d’un autre préalable pour produire ses effets : l’accompagnement social, « le parent pauvre des dispositifs analysés au sein des 23 territoires engagés dans ce dispositif », constate la Fondation Abbé Pierre. Ce pilier de l’intégration des personnes sans domicile dans un logement de droit commun n’est pas assez doté. Et pour cause. Un de ces financements, le Fond de solidarité pour le logement (FSL) est attribué par les départements dont «la situation budgétaire ne permet pas de fournir d’efforts significatifs », regrette Florent Gueguen. L’autre financement, l’AVDL (Accompagnement vers et dans le logement), est alimenté par les astreintes payées par l’Etat au titre du Dalo. « Le Logement d’abord a besoin de modalités de financement plus massives et non de ressources précaires, imprévisibles et insuffisantes », ajoute le dirigeant de la Fédération des acteurs de la solidarité. Surtout si la logique est bien de réduire à terme le parc d’hébergement d’urgence pour favoriser le logement direct des personnes avec un accompagnement social adapté. Pour l’instant, les efforts consentis ne permettent pas d’y arriver.