« Donner un logement ne résout pas tous les problèmes »
Quelles sont les nouvelles formes de précarité aujourd’hui ?
Dans les métropoles, le mal-logement se développe beaucoup. Toutes les personnes précaires sont concernées, en particulier celles exclues d’un emploi stable et rémunérateur. Les jeunes sont les plus affectés, surtout s’ils n’ont pas de soutien familial. Nous assistons aussi à une augmentation de la part des personnes d’origine immigrée sans domicile. Pourtant, elles remplissent une vraie fonction dans la ville en occupant certains emplois difficiles à pourvoir. Une autre forme de précarité s’installe, celle des familles monoparentales. En zone tendue, toutes ces populations sont confrontées à une double impasse : elles ne peuvent accéder ni au marché immobilier privé, ni aux logements sociaux en raison de leur pénurie. Elles se replient vers du logement en marge : habitat indigne, hébergement chez les tiers, etc. Hors grandes agglomérations, les personnes âgées aux petites retraites sont de plus en plus concernées par la précarité, à côté de toutes les populations en difficulté à cause du chômage et des déstructurations familiales.
Quels sont les profils concernés par l’habitat indigne ?
Les familles monoparentales sont fortement impactées par la crise du logement, et par des conditions de vie inadaptées. Quant aux femmes, elles se retrouvent souvent éloignées des centres urbains ou avec des taux d’effort bien trop élevés au regard de leur situation économique. Elles font partie des publics vulnérables qui ont besoin d’un logement social pour pouvoir retrouver un équilibre financier. Or, ces nouveaux publics sont considérés comme à risque par certains bailleurs sociaux.
Comment fonctionnent les organismes HLM face à ces publics ?
Des bailleurs sociaux jouent le jeu en relogeant les plus précaires en priorité. Cependant, l’augmentation des ces personnes dans l’accès au logement social met en péril celui des classes moyennes. En France, nous avons la chance d’avoir une politique du logement social avec une conception généraliste qui favorise l’accueil de tous et stabilise la société. Si les personnes précaires ont un tel recours au logement social, c’est parce qu’au-delà des loyers faibles, elles ont besoin de vivre dans un lieu, sans risque d’y être délogées. Le logement compense de plus en plus les difficultés des autres sphères sociales : séparation conjugale, chômage, etc. Pour autant, donner un logement ne résout pas tous les problèmes.
Pourquoi ?
Souvent, quand les personnes fragiles ont retrouvé un toit, les problèmes, familiaux, économiques, professionnels reviennent encore plus fortement dans leur vie parce qu’elles pensaient auparavant que leurs difficultés étaient liées au logement. Le relogement doit être corrélé avec un accompagnement social quand c’est nécessaire, et surtout une politique générale de diminution de inégalités sociales. Enfin, un autre public précaire aurait besoin de stabilité au niveau du logement : les personnes passées par l’aide sociale à l’enfance qui s’arrête brutalement à 18 ou 21 ans. Un quart des sans domicile nés en France sont passés par l’aide sociale à l’enfance. Pour ces jeunes qui n’ont ni réseau familial, ni revenus, il faudrait une politique de passerelle vers le logement social, ou les aider à se loger sur le marché privé. Il faut également réguler le parc privé : l’encadrement des loyers est un premier pas, car le marché privé, devenu inaccessible financièrement, alimente le nombre d’exclus du logement.