La chaleur au cœur des territoires
La directive sur les EnR introduit une contrainte spécifique, consistant à augmenter la part de ces énergies à des fins de chauffage (et froid) d’au moins 1% chaque année.
La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prend largement en compte cet objectif, puisqu’elle prévoit d’atteindre une quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux entre 31 et 36 TWh en 2028, soit 2,4 à 2,8 fois plus qu’en 2016. En outre, la PPE prévoit une hausse du Fonds chaleur qui atteindra 350 millions d’euros dès 2020 (contre 307 M€ en 2018 et 255 M€ en 2016). Lancé en 2009, ce dispositif a permis une forte montée en puissance des projets, notamment de réseaux locaux.
Des objectifs difficiles à atteindre
Néanmoins, à la veille de la présentation de la PPE (première mouture en novembre 2018), l’édition du Panorama de la chaleur renouvelable et de récupération confirmait le retard pris par la France dans l’atteinte des objectifs de la loi de transition énergétique pour la croissance verte – 38% de chaleur renouvelable dans notre consommation de chaleur en 2030 – et vis-à-vis de ses engagements européens en matière d’énergies renouvelables et de lutte contre le changement climatique. Les professionnels du secteur soulignaient qu’en 2017, la chaleur renouvelable n’avait représenté que 18,7% de la consommation finale brute de chaleur. Pourtant, ce secteur constitue un enjeu majeur dans la lutte contre le changement climatique, puisqu’il représente 50% de notre consommation énergétique et que la chaleur reste majoritairement produite par des énergies fossiles importées. En plus, la France accuse un retard par rapport à ses voisins européens, avec 6% des besoins en chauffage couverts par des réseaux de chaleur, contre 20% dans les pays d’Europe du Nord. Si les territoires se sont saisis du Fonds chaleur, c’est notamment parce que les réseaux de chaleur ou de froid permettent de s’adapter aux particularités desdits territoires en valorisant les énergies présentes sur place. En région parisienne, le recours à la géothermie peut être privilégié, tandis que dans les zones rurales, le réseau peut être alimenté en biomasse ou méthanisation, et ailleurs en zones urbaines, grâce aux usines de traitement des déchets ou encore aux data centers.
Le SER met en garde sur les incertitudes
Mais pour « tenir la trajectoire », le SER signale qu’il est utile de maintenir des dispositifs de soutien adaptés, comme la réduction de la TVA pour les réseaux vertueux alimentés à plus de 50% par des énergies renouvelables, ou le fonds chaleur, qui permet d’apporter une contribution aux investissements à réaliser et ainsi de remettre les réseaux de chaleur en concurrence économique avec les énergies fossiles.
Le gel de la taxe carbone risque de freiner les projets de chaleur.
En outre, les moyens additionnels alloués (notamment sur le fonds chaleur) l’ont été sur la base d’une augmentation future de la contribution climat-énergie (encore appelée taxe carbone). Or, tandis que les retours de terrain montraient que les industriels ou les collectivités commençaient à intégrer l’impact présent et futur de cette contribution dans leurs décisions d’investissement, le gel de la trajectoire de la taxe carbone, et les interrogations plus fondamentales que le Grand débat a fait peser sur son avenir, risquent de freiner, voire de bloquer les projets, insiste le SER. Enfin, la pénétration des énergies renouvelables dans ce secteur se produira dans un contexte tendu d’efficacité énergétique (baisse de la demande en énergie primaire) ; leur part devrait passer de 18,1% en 2015 à 26,3% en 2030.