EnR : la France pourra-t-elle répondre aux objectifs de Bruxelles ?
L’objectif européen en matière d’énergies renouvelables (EnR) étant fixé à 32% en 2030, la France veut marquer son engagement, en ciblant ce pourcentage dès 2028.
La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) s’inscrit pleinement dans l’objectif européen, qui décline l’objectif global par usage, en visant à la fois la chaleur et le froid renouvelable, les EnR électriques, le secteur des transports (les biocarburants) et même l’hydrogène. Cependant, si la PPE grave dans le marbre les 32% en 2028, soit un peu en avance par rapport à la Loi de transition énergétique pour une croissance verte de 2015, dans le détail quelques objectifs changent. Sur le biogaz, la PPE est en retrait avec 7% de la consommation de gaz en 2030, alors que la LTECV prévoyait 10% à cet horizon. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) a été prompt à souligner ce « recul net », jugeant négatif de conditionner « son futur développement à des baisses de coûts trop brutales ». Le recours aux biocarburants « avancés » est acté avec des objectifs de 3,8% pour l’essence et 3,2% pour le diesel, qui s’ajoutent à la cible déjà atteinte de 7% de biocarburants de première génération.
Le froid devient une préoccupation
Sur la chaleur renouvelable (pompes à chaleur, solaire, géothermie profonde, biomasse), la PPE reconnaît le fort potentiel. Elle vise une hausse de production de 25% en 2023 par rapport à 2016 (155 TWh), et entre + 40% et + 59% en 2028, sur un besoin global en chaleur évalué à 635 TWh à cet horizon, contre 741 TWh en 2016. La PPE propose en outre une obligation de recours à la chaleur renouvelable dès 2020 dans la construction neuve.
L’objectif de 23 % d’EnR en 2020 ne sera pas respecté.
Le renforcement du fonds chaleur (dédié aux réseaux de chaleur) est aussi acté, avec 350 millions d’euros sur 2020 et 2021, contre 255 M€ en 2018. Mais, signale le SER, c’est loin d’une multiplication par deux de ce fonds. Le choix de la PPE est aussi de faire évoluer le CITE (crédit d’impôt en faveur de la transition écologique) pour favoriser l’achat de chaudières renouvelables. Enfin, le SER attire l’attention sur le manque de précision concernant le froid renouvelable, et rappelle que 6% de la production totale d’électricité est utilisée pour la climatisation (30 TWh).
Les énergies marines malmenées
Pour la partie électricité, le report à 2035 (contre 2025) de l’objectif de part du nucléaire à 50% dans le mix électrique du pays est désormais acté, mais ne modifie pas l’ambition d’atteindre une part de 40% d’EnR en 2030 (36% à l’échéance 2018 de la PPE). Cependant, côté filières, le compte n’y est pas toujours. Pour le solaire (PV), les capacités devraient être multipliées par cinq à six d’ici à 2028, soit 40 GW environ. Et, si l’éolien terrestre devrait passer de 13,5 GW en 2017 à 24,6 GW en 2023, puis autour de 35 GW en 2028, l’offshore ne devrait compter « que » 2,4 GW en 2023 et quelque 5 GW en 2028. La faute notamment au peu d’appels d’offres pour l’éolien flottant que l’on prévoit à ces échéances ; la faute aussi, selon la profession, à un manque d’ambition. Le SER a maintes fois répété que l’objectif 2020 (23% d’EnR en France) ne serait pas atteint, notamment à cause des retards pris sur la chaleur renouvelable, mais aussi en termes de développement des énergies offshore. Il faudra donc que la PPE soit respectée à la lettre pour que les objectifs européens soient tenus par la France.