Impact du paquet hiver sur le tissu industriel français
Touchant à l’ensemble des secteurs, le paquet « Une énergie propre pour tous les Européens » a un impact sur toutes les sphères d’activité en France.
En France, la Loi de transition énergétique pour une croissance verte (LTECV) l’a précédé et a largement anticipé les objectifs du paquet européen. Ainsi, la transposition des directives Energie renouvelable et efficacité énergétique devrait être plus aisée que dans certains autres pays européens, dans la mesure où les objectifs français en la matière sont soit égaux, soit plus ambitieux que ceux de leurs homologues européens. L’Union française de l’électricité (UFE), le syndicat professionnel du secteur, s’est d’ailleurs fortement mobilisée au niveau européen pour que les objectifs de l’UE soient améliorés par rapport à la présentation faite en 2016 par la Commission européenne. Celle-ci prévoyait en effet un seuil de 27% de renouvelables, contre les 32% adoptés, et un gain de 30% d’efficacité énergétique, contre les 32,5% validés.
Le secteur énergétique en pleine mutation
Le secteur de l’énergie est fort logiquement le premier concerné. Les centrales au charbon se voient imposer un seuil d’émissions de CO2 annuel et elles sont empêchées de participer aux mécanismes de capacités, auxquels les Etats membres peuvent avoir recours afin de sécuriser l’approvisionnement en électricité dans le cas où les énergies renouvelables viennent à faire défaut. En France, la traduction directe est anticipée, puisque le gouvernement a annoncé que les quatre dernières centrales au charbon françaises seraient définitivement arrêtées en 2022… pour autant que cet arrêt ne mette pas en péril la sécurité d’alimentation. Il faut souligner que la part du charbon dans la production d’électricité française est très minime (1,1% en 2018). Les énergies renouvelables devraient, elles, faire un véritable bond, passant de 49 GW installés en 2017 à 102 GW, voire 113 GW en 2028, soit une multiplication par 5 à 6 des capacités solaires et par 2,5 des capacités éoliennes. De quoi créer un marché et des emplois dans ces secteurs, tout au moins au niveau de l’installation des équipements. Au global, la production électrique devrait progresser en Europe d’ici à 2030, à l’aune du paquet hiver, mais grâce à l’amélioration de l’efficacité énergétique du secteur cette hausse sera contenue autour de 7%.
L’industrie et le transport remodelés
L’autorisation du recours à l’autoconsommation permettra également de favoriser les technologies liées au smart grid, voire à la blockchain, boostant ainsi les nombreuses start-up du tissu industriel français, tirées par les grands acteurs internationaux, comme Schneider Electric. Dans le secteur industriel, qui pèse environ 25% de la consommation finale d’énergie, le paquet législatif impose de sérieux gains d’efficacité énergétique. Le découplage entre croissance en valeur et demande énergétique impose des efforts particuliers, via le remplacement d’équipements anciens par de plus efficaces.
La LTECV a largement anticipé les objectifs du paquet européen.
Cela suppose également une réorientation de certains process (des combustibles fossiles vers l’électricité pour le secteur de l’aluminium par exemple) ou d’intrants différents (comme un plus grand recours au bois dans la construction afin d’éviter les émissions de GES liées au ciment). Sans oublier les systèmes de management de l’énergie. La PPE vise ainsi un recul de 9% des consommations d’énergie de l’industrie entre 2016 et 2028. Quant aux transports, ils sont appelés à un profond changement à l’aune du développement de la mobilité propre (notamment électrique) citée et favorisée par le paquet hiver dans le cadre de la directive sur la performance énergétique des bâtiments. Cela suppose une montée en puissance des véhicules zéro émission tant pour les particuliers que pour le transport de marchandises (trains et camions, grâce au recours à l’hydrogène ou au biogaz). Une orientation traduite dans la PPE qui s’accompagne d’une amélioration du déploiement des recharges et, côté véhicules lourds, d’aides à la conversion vers des véhicules au biogaz ou à l’hydrogène. Enfin, dans le secteur de la construction, la première directive adoptée par le Parlement et le Conseil européens, en avril 2018, est relative à la performance énergétique des bâtiments. En France, la future réglementation thermique, RT 2020, qui est la norme de construction dans le neuf, doit donc en tenir compte. C’est déjà majoritairement le cas, puisque la RT 2020 prévoit que toute nouvelle construction devra produire davantage d’énergie qu’elle n’en consomme, reprenant le concept des bâtiments à énergie positive (Bepos). Ils affichent ainsi une consommation énergétique très réduite, compensée par le recours au renouvelables.
L’articulation de la législation européenne avec les plans nationaux
La PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie) et la SNBC (Stratégie nationale bas-carbone) forment les bases du Plan national énergie climat français.
La PPE fixe les priorités d’actions des pouvoirs publics dans le domaine de l’énergie pour deux périodes de cinq ans (horizon 2028). Elle traite de l’ensemble des piliers de la politique énergétique.
La SNBC est la feuille de route de la France pour conduire la politique d’atténuation du changement climatique. Elle oriente la mise en œuvre de la transition vers une économie bas-carbone dans tous les secteurs, avec pour objectif la neutralité carbone en 2050. Pour compléter le dispositif, une « petite » loi sur l’énergie est en débat. Elle va permettre une transposition par ordonnances des textes du paquet hiver.