Les régions engluées dans l’imbroglio des lignes de desserte fine
Intervenant pour 45% dans le financement des lignes de desserte fine du territoire, les régions peinent à imposer leurs critères au transport ferroviaire régional.
Qui conduit le train des collectivités ? Les régions, car elles estiment avoir désormais le droit de décider des modalités du transport ferroviaire régional et de la qualité du réseau ferré. En 2018, elles ont consacré 24,5% de leur budget aux besoins en Transports et Mobilité, soit 10,3 Md€, dont 3 Md€ ont été réservés aux dépenses d’investissement. Elles interviennent aussi régulièrement pour 45% dans le financement des lignes de desserte fine du territoire UIC 7 à 9, quand l’Etat investit 25% et SNCF Réseau 10%. C’est dire si la question de la suppression de l’exploitation de ces lignes de desserte locale les touche directement.
Les dessertes fines n’ont rien de global
Chance ou malchance, la problématique des lignes UIC 7 à 9 intervient alors que les régions débattent des modalités d’ouverture à la concurrence des TER et achèvent de négocier avec le Groupe SNCF le transfert des matériels ferroviaires sous leur juridiction. S’il semble que cette coïncidence soit l’occasion de traiter le dossier ferroviaire dans sa globalité, les dessertes fines n’ont rien de global. Elles tiennent du particularisme, comme l’a expliqué Patrick Jeantet, président de SNCF Réseau : « Derrière cette terminologie se cachent beaucoup de variétés, des maillons d’axes nationaux comme Paris-Cherbourg, des dessertes régionales comme Rennes-Saint-Malo, des dessertes périurbaines comme les trains de l’Ouest lyonnais… Et puis on a de vraies petites lignes, qui sont des dessertes rurales, comme Rodez-Séverac dans l’Aveyron. » En clair, le réseau ferré opérationnel et le réseau des lignes de desserte fine sont imbriqués de façon quasi inextricable. Impossible, dès lors, de négocier l’ensemble des lignes de desserte fine sans faire à l’opérateur des concessions financières qui réduiront à néant les efforts de réduction des coûts des régions. Même la menace de changer d’opérateur ferroviaire perd de son poids puisqu’aucun opérateur sensé ne voudra, sauf à accepter de grever ses bénéfices, s’engager à circuler sur des lignes non rentables ou ralenties à cause de leur obsolescence et encore moins à les régénérer.
Les régions devront payer le maintien des petites lignes
Régions de France devra donc négocier ses transports régionaux avec l’opérateur ferroviaire historique au moins jusqu’en 2020, puisque c’est la date à laquelle la propriété du gestionnaire du réseau ferré lui échappera. SNCF Réseau deviendra alors une Société anonyme à capitaux publics indépendante. L’avenir n’est cependant pas totalement sombre : le groupe SNCF possède des filiales ferroviaires particulièrement dynamiques et efficaces sur lesquelles les régions pourront s’appuyer. En outre, SNCF Réseau montre de la bonne volonté pour résoudre quelques cas des 9137 km de lignes de desserte fine. La difficulté viendra des décisions qui concerneront les lignes auxquelles tiennent les communes. Si celles-ci acceptent de financer le maintien de leurs lignes, c’est en grande partie la région qui paiera. Si la ligne ferroviaire est remplacée par une ligne d’autocars, la région mettra encore la main à la poche, sans pour autant être assurée d’une quelconque reconnaissance par les communes qui se sentiraient lésées. Dernier problème, la réforme fiscale de 2020 présente un risque sérieux de réduire les dotations des régions, en partie parce qu’ayant un bilan financier positif en 2018, le gouvernement pourrait juger qu’elles ont moins de besoins qu’elles le prétendent.