Les risques varient selon l’infrastructure
L’accident du pont Morandi de Gênes, en 2018, a cristallisé l’angoisse des Français sur l’état de leurs infrastructures. Tour d’horizon des risques routiers supposés.
Survenant après les avertissements du rapport du COI sur la nécessité de rénover les infrastructures routières et ferroviaires, le drame du pont Morandi à Gênes (Italie) en août 2018 a soufflé un vent de panique jusqu’en France parmi les élus et le grand public. En cause : leur ancienneté. Les voies routières les plus menacées par l’âge sont les routes du réseau communal des zones de montagne et des zones agricoles. En effet, comme l’affirme Pierre Calvin, président de Routes de France : « Plus le réseau est de moindre importance, plus il subit les affres du temps, car le manque de fonds a transformé l’entretien des routes en variable d’ajustement des dépenses. En outre, ces voies ne sont pas prévues pour la circulation des poids lourds de plus de 35 tonnes ou à trois essieux à l’arrière, particulièrement agressifs pour les routes de campagne et pour les ronds-points. Or, leur trafic sur ces routes a augmenté de 6% en 2017. » S’ajoute à cela le fait que tous les passages à niveau traversants ne sont pas encore sécurisés.
53% du réseau national en mauvais état
Du côté du réseau routier national non concédé, le constat est aussi sévère : « En 2016, seuls 47% du réseau étaient en bon état, poursuit Pierre Calvin. Aujourd’hui, ce pourcentage doit être tombé autour de 40%. Nous estimons que 50% des routes que l’Etat n’a pas entretenues n’ont plus de marquage au sol visible et montre un affaiblissement de leur adhérence, ce qui multiplie par deux la distance de freinage des véhicules. Par ailleurs, 40% des panneaux de signalisation ne sont plus aux normes. Quant aux obstacles latéraux -arbres, piliers de ponts ou poteaux téléphoniques-, ils ne sont pas isolés, alors qu’ils génèrent un tiers des accidents graves. »
Un pont fermé chaque jour
En ce qui concerne les ponts routiers, « les directions départementales de l’équipement gèrent bien leur travail de surveillance et de maintenance au niveau des ponts financés par les départements, rassure Yves Crozet, président du Think Tank de l’Union routière de France. Ce sont les ponts qui connaissent le plus de trafic qui réclament un besoin urgent de réparation. » De fait, si les vieux ponts de Moselle et d’Alsace construits après-guerre, comme le pont de Cattenom-Koenigsmaker et de Thionville, sont déjà en cours de réfection, les nombreux viaducs à travées indépendantes et à poutres précontraintes (VIPP) construits dans les années 1950 suscitent une vraie inquiétude au Syndicat national des entrepreneurs spécialistes de travaux de réparation et de renforcement des structures (STRRES). «L’état des ouvrages d’art en France se rapproche de la ligne rouge, s’alarme son président Christian Tridon, qui milite pour des réparations urgentes de rénovation. Un pont ferme chaque jour en France. » Ces VIPP sont nombreux à souffrir d’un déficit d’armatures métalliques, de mauvaise étanchéité de la structure, de défauts d’injection des gaines de précontrainte et de problèmes d’aciers sensibles à la corrosion fissurante sous tension. Enfin, paradoxalement, la modernisation du réseau menace l’intégrité des routes nationales ou départementales qui traversent les villes. En effet, à chaque fois que la chaussée est creusée pour insérer des capteurs, des câbles ou des tuyaux, son homogénéité et son imperméabilité sont affectées.