Transport routier et ferroviaire : les causes du vieillissement du réseau
La sécurité des conducteurs mais aussi le développement économique des collectivités passent par un bon état des routes. Combattre leur usure est une préoccupation quotidienne, d’autant que les budgets alloués par l’Etat sont comptés.
Dans sa démarche de décentralisation, le gouvernement français a mis en place une organisation pour l’entretien et la rénovation des infrastructures routières et ferroviaires non concédées en France. L’Etat se charge des routes nationales, des autoroutes non concédées, des grandes lignes ferroviaires et des LGV (lignes à grande vitesse). Les régions sont à la manœuvre pour l’entretien des lignes ferrées régionales et interviennent dans le financement des routes départementales et des routes communales que gèrent les départements et les communes. Mais, outre que les infrastructures ne sont pas immuables, elles s’usent à des rythmes différents. Elles nécessitent entretien et rénovations.
Les infrastructures victimes de l’eau, du froid et du trafic
Le Livre blanc de l’IDRRIM (Institut des routes, des rues et des infrastructures pour la mobilité), publié en 2017, et le rapport 2016 du Gepur (Gestion et entretien du patrimoine urbain et routier) pointent les raisons de la rénovation des routes : la France étant un pays tempéré, elle connaît deux saisons pluvieuses et une saison neigeuse, ainsi que des écarts de température moyens de 40°C entre l’été et l’hiver.
La raréfaction des fonds publics pousse à l’entretienminimaliste.
Conséquences : les infrastructures ferroviaires et routières subissent des dilatations et des rétractions qui finissent par rompre leur intégrité ou leurs matériaux. En plus, la France étant un pays touristique et de transit de marchandises entre l’Europe du Nord et celle du Sud, elle connaît un fort trafic de véhicules : trains, automobiles, autocars et poids lourds, ces derniers dégradant considérablement les voies routières. Or, l’usure des infrastructures s’accélère avec leur fréquentation. Mi-septembre 2018, un des 72 câbles du pont de l’île de Ré a ainsi cédé sous la conjugaison du climat et du passage. Les routes nationales traversant les communes, et dépendant à la fois de l’Etat et de la commune, souffrent aussi plus fortement du transit que les autres voies communales. Un manque de coordination entre l’Etat et certaines communes – pour des questions budgétaires ou de choix prioritaires – entrave encore la gestion de l’entretien de ces voies. La raréfaction des fonds publics pousse les collectivités à privilégier un entretien minimaliste qui, s’il peut reporter la rénovation, est plus onéreux en en décuplant le coût tous les vingt ans.
Des voies ferroviaires au ralenti
La prééminence du transport automobile, les réticences d’investissement du groupe SNCF sur les lignes peu fréquentées, conjuguées aux restrictions budgétaires affectées à l’entretien des lignes, créent des retards d’investissement, notamment sur les nœuds ferroviaires, comme l’a montré, en septembre dernier, la paralysie du réseau ferré en gare Montparnasse. En même temps, la désaffection des 9 127 km de lignes de desserte fine qui ne concernent que 2% des voyageurs menace l’existence même de ces lignes. Avec un âge moyen des voies et aiguillages de 30 ans et un quart des voies ferrées qui dépassent leur durée de vie normale, le réseau est vieillissant et dégradé, en particulier les « petites » lignes de voyageurs dont l’âge moyen est de près de 40 ans. En 2017, les trafics ont ainsi été ralentis sur 5 500 km de voies, contre 2 500 km en 2008. A titre de comparaison, l’Allemagne est équipée d’un réseau de taille similaire, mais en moyenne deux fois plus jeune. En 2014, les coûts d’entretien en France étaient de ce fait 60% plus élevés qu’en Allemagne, car l’obsolescence des composants de l’infrastructure demande une surveillance renforcée et des opérations de maintenance qui gonflent les coûts.
Une gestion freinée par l’attente de réforme
Enfin, des retards apparaissent à cause de la raréfaction des fonds publics, raréfaction que la réforme fiscale de 2020 pourrait annuler par l’attribution du montant de nouvelles taxes. L’ennui est que ces taxes, dont on ne sait encore s’il s’agira d’une part de la TVA nationale, d’une éventuelle vignette poids lourds ou d’un impôt local, remplaceront les taxes dont bénéficient aujourd’hui les collectivités, comme la taxe d’habitation et peut-être la taxe foncière. Pour les collectivités, le gain sera donc maigre et il importe que ces fonds soient pérennisés, puis bien gérés. Reste aussi à savoir comment s’effectuera la répartition de ces taxes et qui en bénéficiera. Une question qui concerne aussi les fournisseurs en travaux publics.