L’aide au maintien à domicile diffère selon les territoires
La coordination médico-sociale pour le maintien à domicile des aînés pâtit de la complexité de sa gouvernance et d’un manque de moyens.
Exaucer le principal vœu des personnes âgées – vivre le plus longtemps possible chez soi – est une gageure au quotidien pour les coordinateurs du soutien à domicile. En Suède, au Canada, au Danemark, au Japon, et en Allemagne, un référent unique (le « care manager » payé par la municipalité ou un organisme public dédié) évalue les situations, définit un plan d’aide, coordonne les intervenants et contrôle la qualité des services. En France, plusieurs dispositifs remplissent tout ou partie de ces missions : les centres locaux d’information et de coordination (CLIC), les réseaux de santé et les services de gestion de cas des dispositifs MAIA (Méthode d’action pour l’intégration des services d’aide et de soins dans le champ de l’autonomie). Leurs actions sont financées par trois échelons de gouvernance : les agences régionales de santé pour les interventions médicales et médico-sociales, le département pour les actions médico-sociales et sociales, et les communes, quand celles-ci proposent des dispositifs d’aides optionnels dans les domaines médico-social et social.Cette multiplicité des intervenants déboussole les usagers et les professionnels de la santé, mais aussi les acteurs de coordination eux-mêmes.
La multiplicité des intervenants déboussole les usagers.
« Il y a autant de territoires que de manières de fonctionner. C’est la complexité à la française », constate Richard-Pierre Williamson, le président de l’Association nationale des coordinateurs et coordinations locales (ANC.CLIC). Ainsi, dans la moitié des départements, ce sont les CLIC qui sont en charge de la coordination du soutien à domicile, alors qu’elle est opérée par les services des départements dans 20% à 25% des cas, et dans le quart restant par un EPCI (Etablissement public de coopération intercommunale) ou un groupement de coopération sociale et médico-sociale, plateforme territoriale d’appui.
Faire confiance aux acteurs de terrain
« Les plateformes territoriales d’appui apportent enfin une réponse nouvelle. Elles visent à regrouper tous les acteurs locaux de la prise en charge, offrant ainsi un guichet unique à l’usager, des réponses coordonnées pour tout public, et venant en appui aux premiers recours, notamment les médecins », estime Richard-Pierre Williamson, qui cite le Grand Nancy, l’Association gérontologique de Gâtine (Deux-Sèvres) ou Paris comme étant exemplaires. « Il faut faire confiance aux acteurs de terrain : sur un même territoire, les gens se connaissent et se font confiance. Certes, un cadre institutionnel est indispensable, mais il faut se garder de modéliser à outrance et laisser la place aux initiatives locales. Le Contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) permet d’expérimenter, d’évaluer et de recadrer si besoin. » Cette position est défendue par la Fédération nationale des dispositifs de ressources et d’appui à la coordination des parcours en santé (FACS, fondée en avril 2018) qui appelle de ses vœux une gouvernance nationale « lisible, partagée, unifiée » et un décloisonnement des financements.
Plus de budget et de formation
Les coordinateurs du maintien à domicile sollicitent également davantage de moyens. « Un CLIC emploie en moyenne 3 ETP (équivalent temps plein) et ouvre 1 000 nouveaux dossiers chaque année. Les budgets devraient être calculés en fonction de l’évolution démographique des territoires : en PACA et sur le littoral atlantique, il faudrait doubler les moyens existants » poursuit le président de ANC. CLIC. De même, sur le terrain, les travailleurs sociaux peinent à suivre les situations, toujours plus nombreuses, sans disposer de ressources supplémentaires. Au sein des 352 dispositifs MAIA, dédiés aux situations compliquées (maladies neurodégénératives, personnes très fragiles, etc.), les 1 000 gestionnaires de cas (fonction apparue avec le 3e plan Alzheimer de 2008-2012) se heurtent à la complexité administrative pour mettre en œuvre un plan d’action rapide. Selon Richard-Pierre Williamson, « une réflexion doit être menée sur les conditions de travail, la rémunération, la formation continue et l’accompagnement des métiers de la coordination ». En effet, il n’existe pas encore de référentiel national pour ces métiers.
Des aides pour les proches aidants
Depuis 2016, la loi d’adaptation de la société au vieillissement offre un droit au répit aux aidants bénévoles d’un bénéficiaire de l’APA – parents, amis, alliés. Cette aide, plafonnée à 500 euros par an, finance un relais à domicile (comme le baluchonnage, voir p. 31), un hébergement temporaire en établissement ou un accueil de jour ou de nuit. Depuis janvier 2018, les salariés aidants (un sur deux) peuvent prendre un congé sans solde pour une durée maximale de trois mois, renouvelable sans dépasser un an au total. Leur retour en emploi est garanti par la loi, mais pas dans les faits, selon le rapport Gillot de juin 2018.Ouverts par l’Association française des aidants et AG2R-La Mondiale, les 135 « cafés des aidants » écoutent ces personnes partager leur vécu, souvent douloureux. Selon une enquête HSA-HSM, 20% d’entre eux disent assumer une « charge importante à très importante » qui nuit à leur santé (insomnie, stress, voire dépression)