Un élève actif apprend mieux
« Des méta-analyses montrent que le cours magistral est moins efficace que les pédagogies obligeant l’enfant à réfléchir par lui-même », affirme Stanislas Dehaene, neuroscientifique et président du conseil scientifique de l’éducation. Les connaissances sur le fonctionnement du cerveau montreraient en effet que lorsqu’un enfant réfléchit à une réponse, tâtonne, anticipe un résultat… il apprend mieux. En bref, la curiosité est un élément moteur de l’apprentissage. Selon les neuroscientifiques, entre 2 et 5 ans, les enfants sont curieux de tout. Cette faculté est « naturellement » présente chez eux. Mais « cet appétit qui paraissait insatiable finit par s’évanouir, souvent après quelques années à l’école », constate Stanislas Dehaene. Pourquoi ? Les recherches en neurosciences mettent notamment en cause une organisation scolaire trop rigide et le traditionnel cours magistral, trop explicite, qui dissuaderait les enfants d’intervenir ou même de réfléchir, en leur donnant l’impression qu’ils doivent seulement se taire, rester calmes et écouter le cours.
Montrer qu’il reste 1 000 choses à apprendre
Concrètement, les chercheurs en neurosciences préconisent donc, comme le font déjà plusieurs écoles Montessori, d’encourager les questions, les exposés, les travaux en petits groupes… Et d’éviter les démonstrations exhaustives du professeur, qui amènent l’enfant à arrêter de chercher : « L’idéal est de proposer une pédagogie qui encourage la créativité de l’enfant en lui laissant entendre qu’il lui reste, s’il le souhaite, 1 000 choses à découvrir », explique Stanislas Dehaene.
Comprendre comment son cerveau apprend
Reprenant cette idée de faire participer l’enfant à son apprentissage, Olivier Houdé, instituteur et professeur de psychologie à Paris Descartes, va plus loin. Dans son livre L’école du cerveau, il suggère de mettre en place un « neurofeedback », c’est-à-dire la possibilité pour chaque élève de disposer de l’imagerie médicale de son propre cerveau afin qu’il puisse réguler son activité. On le fait déjà par l’intermédiaire de montres connectées qui indiquent le nombre de calories brûlées ou encore de pas réalisés dans une journée, remarque le chercheur. Pourquoi ne pas l’appliquer à l’activité de notre cerveau ? Cette idée a déjà été expérimentée sur des enfants présentant des troubles de l’attention et une hyperactivité : « Dans ce cas, le neurofeedback obtenu sur les régions cérébrales du contrôle attention a constitué une voie alternative aux traitements pharmacologiques ; il a permis de diminuer l’impulsivité et d’améliorer la concentration », explique Olivier Houdé, pour qui cette technologie pourrait être testée afin d’« inciter un enfant à ne pas donner des réponses fausses parce que trop hâtives ou à adapter son mode de raisonnement à la situation rencontrée ».
Un élève actif… et un cours structuré
L’idée de quitter le cours magistral pour faire des élèves les acteurs de leur apprentissage n’est pas nouvelle. Déjà Rousseau préconisait de laisser l’enfant découvrir par lui-même, tâtonner, sans lui donner de cadre afin qu’il acquière un esprit autonome. Mais la neuropédagogie veut se distinguer de la pédagogie rousseauiste. Certes « généreuse et séduisante », « son inefficacité a été 100 fois démontrée », rappelle Stanislas Dehaene. En effet, selon lui, l’élève doit être un acteur engagé dans son apprentissage, mais il est aussi crucial de lui offrir « un enseignement structuré, doté d’une progression claire et rigoureuse ».