La politique énergétique française : des programmes… à mettre en œuvre
La transition énergétique imprime sa marque sur la politique énergétique française via un arsenal de textes législatifs. Loi de transition de 2015, PPE, plan climat et stratégie bas-carbone. Reste à inscrire ces textes dans la réalité. Pour l’instant, le compte n’y est pas.
Trouvant son origine dans la lutte contre le changement climatique, la transition énergétique touche à l’ensemble des aspects de l’énergie. Sur un plan écologique bien sûr, par la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et la diminution de l’ensemble des impacts environnementaux et sanitaires. Sur l’économie ensuite, avec la volonté de réduire la dépendance énergétique de la France, de créer des emplois et de gagner en compétitivité. Par une démarche sociale enfin, pour contenir le prix de l’énergie et lutter contre la précarité énergétique.
Un socle de base, la LTECV
Pour faire face à ces enjeux, la France dispose d’un cadre depuis mi-2015 : la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV). Une loi qui marque l’ambition de la France à l’aune de la COP21 en décembre 2015, quand allait être signé l’Accord de Paris. La LTECV prévoit notamment la réduction de 40% des émissions de GES en 2030 par rapport à 1990, 32% d’EnR (énergies renouvelables) dans la consommation et 40% de la production d’électricité en 2030. Elle grave aussi dans le marbre un recours à une consultation sur la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), véritable plan d’actions pour mettre en œuvre la politique définie.
La PPE 2018 constitue un enjeu important pour corriger la trajectoire.
Une PPE qui n’est pas un programme EnR, comme a pu l’être le programme nucléaire des années 1970, mais qui va bien au-delà, abordant l’énergie dans toute sa diversité : efficacité énergétique, réduction de la consommation d’énergie finale et primaire d’énergies fossiles, développement des EnR, sécurité d’approvisionnement, système énergétique de demain, mobilité propre. Et bien entendu, La LTECV a imposé un objectif peu tenable de réduire la part du nucléaire dans le mix électrique à 50% dès 2025. Après avoir reçu les scénarios de RTE (Réseau de transport d’électricité) montrant le risque de devoir avoir recours à des capacités au gaz, Nicolas Hulot, alors ministre de la Transition écologique et solidaire, n’a pu que repousser cet objectif, pour privilégier la réduction des GES. Laissant à la PPE en cours le soin de fixer des échéances « réalistes » pour atteindre les 50% de nucléaire.
Des textes pour une société bas-carbone
La France a également annoncé en 2017 son Plan climat qui se donne pour objectif de viser la neutralité carbone en 2050. Il entend mettre un terme aux énergies fossiles, en interdisant l’exploitation d’hydrocarbures en France d’ici 2040, et prévoit l’arrêt du recours au charbon. Sur le volet social, il veut inciter les plus modestes à changer de véhicule et entend trouver une solution pour réduire les factures de chauffage. Les citoyens seront associés au suivi de ce Plan climat. Une Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) a aussi été fixée. Elle définit une « trajectoire de long terme » de réduction des GES pour atteindre l’objectif à 2050 et fixe des plafonds d’émissions de GES au niveau national à ne pas dépasser sur des périodes de 5 ans. Déjà bien placée, grâce au nucléaire, sur le plan des émissions du secteur électrique, la SNBC s’attaque aussi aux autres sources de rejets carbonés, comme les transports ou le bâtiment, les plus gros émetteurs de GES. Cette SNBC est, comme la PPE, révisable cette année. Une consultation publique a eu lieu fin 2017, alimentant le débat sur la PPE et engageant la réactualisation de cette stratégie.
De nécessaires ajustements
Trois ans après la LTECV, les mesures mises en œuvre ne permettent pas « d’atteindre les objectifs » d’après les conclusions d’un avis du Conseil économique, social et environnemental (CESE). Pis, les mesures conseillées par l’organe consultatif au moment de la première PPE, en 2016*, n’ont jamais été prises en compte. La PPE en débat en 2018, qui engage sur les dix prochaines années, avec révision au bout de cinq ans, constitue un enjeu important pour corriger la trajectoire. En outre, la France doit également s’inscrire dans le cadre européen. Le paquet « Energie propre pour l’Europe » en cours de discussion donnera également des orientations fortes pour l’avenir. Par ses engagements et ses plans d’actions, la France devrait clairement imprimer sa marque, se voulant exemplaire sur le plan international.
* La première PPE est dans la foulée de la LTECV et engage pour 7 ans (2023), mais révisable au bout de 2 ans.