« La culture de la commande publique change »
Les revendications portées depuis longtemps par le Medef sur la simplification de la commande publique sont désormais inscrites dans la loi. Reste à faire évoluer les pratiques.
Gilles de Bagneux, président du comité de la commande publique du Medef
La commande publique est-elle véritablement simplifiée pour les entreprises ?
L’administration a beaucoup travaillé sur le sujet, en nous associant régulièrement. Le partage des réflexions entre l’administration et les entreprises, sur la simplification des marchés publics, a largement évolué dans le bon sens.
Fixer des règles permettrait aux acheteurs de repérer les offres anormalement basses.
L’inscription du sourcing dans le droit est un exemple de cette évolution positive. La culture de la commande publique change. Celle qui se construit est commune aux acheteurs publics et aux entreprises.
Que reste-t-il encore à faire ?
Il faut encourager davantage les retours d’expérience pour améliorer les offres et leurs réponses lors des renouvellements des marchés. Des marges de progression existent sur certains aspects techniques. Un exemple : comment les acheteurs peuvent-ils détecter les offres anormalement basses ?
Il serait très utile de fixer des règles qui leur permettraient de les repérer systématiquement et par là même de supprimer le risque pénal de favoritisme qui pèse sur eux.
Par ailleurs, les acheteurs ne peuvent pas être spécialisés dans tous les secteurs et les cahiers des charges peuvent mal refléter le besoin de l’acheteur. Là aussi le sourcing est un outil qui peut s’avérer utile, en ce qu’il permet une bonne connaissance du tissu économique et technique, afin d’adapter le cahier des charges au besoin.
Vous alertez aussi sur les difficultés de trésorerie de certaines entreprises…
Selon les derniers chiffres publiés par BTP Banque sur les bilans des entreprises, celles-ci n’arrivent pas à équilibrer leur trésorerie du fait des retards de paiement des clients.
Les délais s’allongent, avec une moyenne de 15 jours de retard sur le délai officiel de 60 jours, sans compter les délais cachés, comme le refus des factures pour des raisons formelles. Nous espérons que la facturation électronique permettra une plus grande transparence et un meilleur suivi des factures.
Nous encourageons également le recours au médiateur des entreprises, qui comprend nos contraintes et est très actif sur ce dossier – notamment en proposant de ne plus présenter systématiquement de garantie bancaire lorsqu’on reçoit une avance du client.
Autre avancée majeure : quand une collectivité oppose un désaccord sur une facture, elle doit payer immédiatement le montant qu’elle ne remet pas en cause. Toutes les dispositions existent sur le plan légal ou réglementaire ; ce sont les pratiques qui doivent changer.
Pour les avances obligatoires sur un marché, beaucoup d’acheteurs se contentent de verser les 5 % minimums alors que le droit permet d’aller jusqu’à 30 %.
Les entreprises sont-elles prêtes pour la dématérialisation ?
Le passage à la dématérialisation des candidatures (DUME) au 1er octobre prochain et le déploiement progressif de la facturation électronique sont l’opportunité de dialoguer et de se former ensemble à ces nouveaux outils. Pour franchir cette étape, la coopération est indispensable. Là encore, il s’agit de faire évoluer les pratiques.
Certes, il y aura une période d’adaptation nécessaire avec le passage du papier au numérique, mais l’objectif commun est qu’à terme chacun profite des avantages de la commande publique, formidable levier de croissance économique, d’innovation, de cohésion sociale et territoriale.
Propos recueillis par Sylvie Fagnart